Un homme se penche

Je me penche :
suis-je au-dessus de la mer
ou bien sur la margelle
d’une pauvre pensée ? – je ne sais.
Mon âme roule jusqu’au fond
telle une bague qui glisse
du doigt émacié par la maladie.
Viens, ô fin ! répands ta cendre sur toutes choses.
Il n’y a plus d’appel pour m’étourdir,
ni de chemin qu’il me tarde de parcourir.
Viens, ô fin.
Accoudé une fois encore
à ras de terre je me soulève,
l’oreille à l’écoute.
Il me semble entendre au loin
une eau frappant un rivage.
Autrement rien, rien,
rien.

Lucian Blaga, L’étoile la plus triste

 

Le rien

Je plonge dans mes souvenirs : rien,
je n’en ramène rien.
J’ai écrit, écrit, écrit.
J’ai tout noté :
rien.
Les nuages volent, la rivière
traverse les plaines, la lumière s’ouvre
et se ferme.
Rien,
cela n’amène à rien.
Je note ce rien, pour m’en souvenir.

Jan H. Mysjkin. Mysjkin est un traducteur de Blaga.