Rien n’est : le Chaos dort, et la Nuit est muette.
Tous deux sont un, et le monde est ce que tous deux sont
Quand l’illusion vient transmuer son être propre
En apparence qui fait illusion.
Rien n’existe : le Monde a fui et l’Âme est chute.
Tous deux sont tout, ce qui existe n’est personne,
Car l’univers est un rêve qui contrefait
Le rêve que lui-même fait.
Rien n’est là : l’Être manque et le Non-Être abonde.
Tous deux, ce n’est que rien, et tout l’existant passe,
Et tout a l’air d’être la trace d’un serpent –
Le vieux serpent, qui dit et redit : Rien n’est là.
Fernando Pessoa, Poèmes ésotériques
Tel le serpent mythologique qui forme un cercle en mordant sa propre queue, créant le monde en l’anéantissant, le rien occupe l’origine et la fin. De bout en bout, se confondant avec le tout, le rien ne propose que le vide de sa spéculation.
Le poème des flocons de neige
Rien
ne vient
de rien, comme quand un ruisseau
devient
une rivière
qui
se jette
dans l’océan, d’où
l’eau
monte
en vapeur, tombe
en flocons
de neige et redevient
ruisseau
rivière
océan, tu sais – de
rien
en
rien, comme si rien
ne s’était passé.
Jan Erik Vold, La Norvège est plus petite qu’on ne le pense