Sils-Maria
C’était ici que j’attendais, que j’attendais, n’attendant rien,
Par-delà le bien et le mal, jouissant tantôt de la lumière,
Tantôt de l’ombre, abstrait de moi, tout jeu, pur jeu,
Tout lac, tout midi, temps sans but.
Quand, soudain, amie, un fut deux...
Et Zarathoustra passa près de moi...
Friedrich Nietzsche, Chants du Prince Hors-la-loi (appendice au Gai savoir)
Que voulait Nietzsche ? Que pensait Nietzsche ? Vers quel système, quelle philosophie tendait-il ? Nietzsche ne voulait rien : il y a simplement en lui une passion excessive de la vérité – passion qui jouit d’elle-même. Elle ne connaît aucune finalité ; Nietzsche ne pense pas pour améliorer ou instruire l’univers, ni pour l’apaiser ou pour s’apaiser lui-même : son extatique ivresse de pensée est une fin en soi, une jouissance qui se suffit à elle-même, une volupté tout à fait personnelle et individuelle, complètement égoïste et élémentaire, comme toute passion démoniaque.
Stefan Zweig, Le combat avec le démon