Le rien est le miroir du quelque chose (de la lumière).
Otto Weininger, Livre de poche
Otto Weininger développe une philosophie dualiste où la sensualité (la femme / la sauvagerie / le Rien) s’affronte à la logique (l’homme / la culpabilité / le Tout), l’être humain formant une combinaison originale des deux... Dans La bibliothèque perdue de Walter Mehring on peut trouver, à la suite d’un portrait du freudisme, cette présentation : «Plus sporadiquement, mais plus dangereuse, une spéculation analogue, venue également de Vienne, trouva de nombreux adeptes ; ce fut le système concernant la Sexualité et le Caractère d’Otto Weininger qui, selon sa thèse de doctorat, prétendait que tout individu est irrémédiablement hermaphrodite, un monstre bisexuel fait d’un mâle plus et d’une femelle moins, ou vice-versa. Sa thèse achevée, l’auteur se trouva atteint d’un complexe d’auto-antisémitisme compliqué d’orgueil infantile, qui l’amena au suicide.» Paix à ton âme, explorateur torturé de l’inconscient ! Cioran exprimera plus tard sa dette envers le jeune penseur décadent qu’il admira dans sa jeunesse pour ses outrances : «Chez Weininger me fascinaient l’exagération vertigineuse, l’infini dans la négation, le refus du bon sens, l’intransigeance meurtrière, la quête d’une position absolue, la manie de conduire un raisonnement jusqu’au point où il se détruit lui-même et où il ruine l’édifice dont il fait partie. Ajoutez à cela le culte de la formule géniale et l’excommunication arbitraire, l’assimilation de la femme au Rien et même à quelque chose de moins.»