Amour : Différence entre versions
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<blockquote>''L'amour laisse comme une traînée de souffre derrière lui, comme une odeur qui traîne. Et que, malgré tout, dès que tu rencontres quelqu'un tu sens... Un peu comme quand tu vas pisser et que tu sens tes doigts. Tu vois ? Ça sent toujours ! Faut te laver les mains deux trois fois avant que tu oublies d'avoir fait pipi...''<ref>Extrait du documentaire ''C'est arrivé près de chez vous'', réalisé en 1992 </ref></blockquote> | <blockquote>''L'amour laisse comme une traînée de souffre derrière lui, comme une odeur qui traîne. Et que, malgré tout, dès que tu rencontres quelqu'un tu sens... Un peu comme quand tu vas pisser et que tu sens tes doigts. Tu vois ? Ça sent toujours ! Faut te laver les mains deux trois fois avant que tu oublies d'avoir fait pipi...''<ref>Extrait du documentaire ''C'est arrivé près de chez vous'', réalisé en 1992 </ref></blockquote> | ||
− | Comme le montrent très bien les études sur l'esclavage dans les sociétés d'hominines, l'acceptation de sa condition, avec tout ce que cela implique d'inconfort et de violence, est la plus courante des façons de se maintenir en vie, voire d'arriver à l'émancipation. S'échapper de l'enfance est quasi impossible. Sauf à mourir. Lorsque les conditions matérielles sont satisfaisantes et que les hominines en charge des enfants ne se laissent pas emporter par l'intensité des sentiments, l'apprentissage peut être fait sans trop de contraintes ou de violences. Le dicton "''Tout par amour, rien par force''"<ref name="#bla"/> résume très bien ce qu'est la méthode douce : Un mélange de "circuit de récompense" et de subterfuges pour faire accepter. Les méthodes plus coercitives, même si elles sont contestées, sont les plus répandues. Elles sont très violentes pour des parents qui, par amour de leur progéniture, sont contraints d'user de cris et de coups pour aider les jeunes hominines à mieux se sentir dans leurs amours. Combien de gifles, de coups de ceinture, de baguette ou de nerf de bœuf pour apprendre ce qu'est l'amour ? Combien de punitions, de réclusions ou d'humiliations pour mesurer l'intensité du sentiment amourien ?<ref>"''Qui ménage le bâton déteste son fils, mais celui qui l'aime lui prodigue la correction''". Conseil éducatif promu par ''La Bible'' au chapitre "Proverbes | + | Comme le montrent très bien les études sur l'esclavage dans les sociétés d'hominines, l'acceptation de sa condition, avec tout ce que cela implique d'inconfort et de violence, est la plus courante des façons de se maintenir en vie, voire d'arriver à l'émancipation. S'échapper de l'enfance est quasi impossible. Sauf à mourir. Lorsque les conditions matérielles sont satisfaisantes et que les hominines en charge des enfants ne se laissent pas emporter par l'intensité des sentiments, l'apprentissage peut être fait sans trop de contraintes ou de violences. Le dicton "''Tout par amour, rien par force''"<ref name="#bla"/> résume très bien ce qu'est la méthode douce : Un mélange de "circuit de récompense" et de subterfuges pour faire accepter. Les méthodes plus coercitives, même si elles sont contestées, sont les plus répandues. Elles sont très violentes pour des parents qui, par amour de leur progéniture, sont contraints d'user de cris et de coups pour aider les jeunes hominines à mieux se sentir dans leurs amours. Combien de gifles, de coups de ceinture, de baguette ou de nerf de bœuf pour apprendre ce qu'est l'amour ? Combien de punitions, de réclusions ou d'humiliations pour mesurer l'intensité du sentiment amourien ?<ref>"''Qui ménage le bâton déteste son fils, mais celui qui l'aime lui prodigue la correction''". Conseil éducatif promu par ''La Bible'' au chapitre "Proverbes. 13,24"</ref> Aucune haine dans cela, bien évidemment, mais un acharnement à sauver l'enfant de ellui-même. Tout au plus, selon les plus traditionalistes, des formes de bizutage pour l'entrée dans l'univers amourien. L'amour est une attention permanente. La tautologie est facile : Lorsque l'on aime une personne, on sait ce qui est bien pour elle, et c'est pour cela qu'on l'aime. |
Que ce soit à Nice, en [[Macédoine]] ou dans le reste du monde, les relations sexuelles sont réglementées au sein des parentèles. Les codes diffèrent un peu d'un endroit à l'autre, mais généralement cela n'est pas encouragé entre des personnes ayant des liens de parenté directs. Il est irrecevable socialement qu'une personne puissent entretenir de telles relations avec ses enfants ou ses petit-enfants. L'amour d'un père ou d'une mère ne peut se satisfaire par des complicités charnelles et érotiques. En France, par exemple, les autorités accordent quelques dérogations pour des mariages entre des cousinages proches mais refusent d'accepter les unions entre des personnes d'ascendance directe. Selon les textes, il s'agit de rapports incestueux. Jusque dans les années [[1970]], gendre, bru, belle-mère et beau-père ne sont même pas autorisés à se marier entre elleux, ni entre elles ou entre eux, alors qu'illes n'ont pas de liens biologiques mais sociaux<ref>Si de nos jours les animaux de compagnie sont partie intégrante d'une famille et qu'il est courant d'entendre parler de "''leur papa''" ou de "''leur maman''", il n'en reste pas moins que de telles relations charnelles demeurent interdites légalement et moralement condamnées alors qu'aucun lien biologique les unit.</ref>. Malgré le cadre législatif, il n'est pas formellement interdit d'entretenir des relations sexuelles incestueuses entre adultes mais la discrétion reste la garante d'une vie sociale apaisée. Les complications administratives arrivent si il y a une naissance de ces amours. Mais de telles situations amouriennes sont beaucoup plus rares que celles qui impliquent des hominines adultes et leurs progénitures lors de l'enfance<ref>Dorothée Dussy, "Une première approche de l'inceste d'un point de vue anthropologique", ''L'Homme'', 2005 -[https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00004140/document En ligne]</ref>. Il ne s'agit pas à proprement dit de pédophilie<ref>La pédophilie est l'attirance physique et sexuelle de l'hominine adulte pour des enfants. Jusque dans les années 1970, elle est considérée comme une pratique sexuelle marginale et un certain militantisme œuvre à sa reconnaissance aux côtés des associations de lesbiennes et de gays. Depuis elle est assimilée à une "''perversion sexuelle''" et est punie par la loi dans de nombreux pays. Ce terme est utilisé pour désigner exclusivement les formes de violences sexuelles à l'encontre des enfants et la pédopornographie alors qu'il recouvre aussi plus largement toutes les personnes non-pratiquantes de ces désirs qu'illes préfèrent restreindre.</ref>, dans le sens d'attirance sexuelle pour les enfants en particulier, mais d'amour pour tel ou telle de ses enfants. Il serait insultant de considérer cela comme un acte de haine, au même titre qu'une maltraitance qui vise volontairement à faire mal ou de la torture, alors que c'est l'amour absolu et inconditionnel qui motive ces gestes incestueux. En effet, l'hominine en amour charnel pour sa descendance reprend le schéma classique qui pose le sentiment amourien au dessus de tout autre chose. L'être aimé est réceptacle d'un débordement qu'ille ne peut refuser, ille est dans la situation de l'hominine vis-à-vis de l'amour divin, alors que cellui qui proclame son amour se trouve en position de force, celle de la divinité qui impose son amour. La relation est déséquilibrée surtout lorsqu'elle implique des hominines enfants qui ne sont pas encore en capacité d'en mesurer les termes exacts. Si l'enfant a moins de trois ans, il paraît évident que les risques d'incompréhension sur le sens réel des mots sont incontournables. S'ille est plus âgé, ce risque reste tout aussi important même si l'acquisition d'un langage commun donne l'illusion du contraire. L'adulte déclame que "''L'amour se passe de mots''"<ref name="#bla"/> pour justifier l'absence de consentement clair. Mais dans l'univers amourien, le consentement de la personne aimée n'est pas une condition explicite. Pour cela, il n'est pas exclu de devoir la contraindre par la force de la "Méthode Coué" du bienfait de ces relations sexuelles, jusqu'au viol, ou alors de la subjuguer avec douceur par des mots, des attentions et des contacts sensuels pour obtenir des retours érotiques à cet amour. | Que ce soit à Nice, en [[Macédoine]] ou dans le reste du monde, les relations sexuelles sont réglementées au sein des parentèles. Les codes diffèrent un peu d'un endroit à l'autre, mais généralement cela n'est pas encouragé entre des personnes ayant des liens de parenté directs. Il est irrecevable socialement qu'une personne puissent entretenir de telles relations avec ses enfants ou ses petit-enfants. L'amour d'un père ou d'une mère ne peut se satisfaire par des complicités charnelles et érotiques. En France, par exemple, les autorités accordent quelques dérogations pour des mariages entre des cousinages proches mais refusent d'accepter les unions entre des personnes d'ascendance directe. Selon les textes, il s'agit de rapports incestueux. Jusque dans les années [[1970]], gendre, bru, belle-mère et beau-père ne sont même pas autorisés à se marier entre elleux, ni entre elles ou entre eux, alors qu'illes n'ont pas de liens biologiques mais sociaux<ref>Si de nos jours les animaux de compagnie sont partie intégrante d'une famille et qu'il est courant d'entendre parler de "''leur papa''" ou de "''leur maman''", il n'en reste pas moins que de telles relations charnelles demeurent interdites légalement et moralement condamnées alors qu'aucun lien biologique les unit.</ref>. Malgré le cadre législatif, il n'est pas formellement interdit d'entretenir des relations sexuelles incestueuses entre adultes mais la discrétion reste la garante d'une vie sociale apaisée. Les complications administratives arrivent si il y a une naissance de ces amours. Mais de telles situations amouriennes sont beaucoup plus rares que celles qui impliquent des hominines adultes et leurs progénitures lors de l'enfance<ref>Dorothée Dussy, "Une première approche de l'inceste d'un point de vue anthropologique", ''L'Homme'', 2005 -[https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00004140/document En ligne]</ref>. Il ne s'agit pas à proprement dit de pédophilie<ref>La pédophilie est l'attirance physique et sexuelle de l'hominine adulte pour des enfants. Jusque dans les années 1970, elle est considérée comme une pratique sexuelle marginale et un certain militantisme œuvre à sa reconnaissance aux côtés des associations de lesbiennes et de gays. Depuis elle est assimilée à une "''perversion sexuelle''" et est punie par la loi dans de nombreux pays. Ce terme est utilisé pour désigner exclusivement les formes de violences sexuelles à l'encontre des enfants et la pédopornographie alors qu'il recouvre aussi plus largement toutes les personnes non-pratiquantes de ces désirs qu'illes préfèrent restreindre.</ref>, dans le sens d'attirance sexuelle pour les enfants en particulier, mais d'amour pour tel ou telle de ses enfants. Il serait insultant de considérer cela comme un acte de haine, au même titre qu'une maltraitance qui vise volontairement à faire mal ou de la torture, alors que c'est l'amour absolu et inconditionnel qui motive ces gestes incestueux. En effet, l'hominine en amour charnel pour sa descendance reprend le schéma classique qui pose le sentiment amourien au dessus de tout autre chose. L'être aimé est réceptacle d'un débordement qu'ille ne peut refuser, ille est dans la situation de l'hominine vis-à-vis de l'amour divin, alors que cellui qui proclame son amour se trouve en position de force, celle de la divinité qui impose son amour. La relation est déséquilibrée surtout lorsqu'elle implique des hominines enfants qui ne sont pas encore en capacité d'en mesurer les termes exacts. Si l'enfant a moins de trois ans, il paraît évident que les risques d'incompréhension sur le sens réel des mots sont incontournables. S'ille est plus âgé, ce risque reste tout aussi important même si l'acquisition d'un langage commun donne l'illusion du contraire. L'adulte déclame que "''L'amour se passe de mots''"<ref name="#bla"/> pour justifier l'absence de consentement clair. Mais dans l'univers amourien, le consentement de la personne aimée n'est pas une condition explicite. Pour cela, il n'est pas exclu de devoir la contraindre par la force de la "Méthode Coué" du bienfait de ces relations sexuelles, jusqu'au viol, ou alors de la subjuguer avec douceur par des mots, des attentions et des contacts sensuels pour obtenir des retours érotiques à cet amour. | ||
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<blockquote>''En amour, la vérité n'est pas une raison. Rien, en matière d'amour, ne ressemble plus à la vérité que le mensonge.''<ref>Romain de Bierzynski, ''Somatologie de la femme'', 1869</ref></blockquote> | <blockquote>''En amour, la vérité n'est pas une raison. Rien, en matière d'amour, ne ressemble plus à la vérité que le mensonge.''<ref>Romain de Bierzynski, ''Somatologie de la femme'', 1869</ref></blockquote> | ||
− | Soit la sexualité recherchée par l'adulte se fait à hauteur d'enfant, c'est-à-dire que le corps de cellui-ci est érotisé en fonction de son âge, soit elle ramène cela à une sexualité d'adulte avec les pratiques qui sont les siennes. Avec les conséquences psychologiques et les séquelles physiques qu'elles peuvent engendrer, mais, la sagesse populaire rappelle qu'à son paroxysme, l'amour peut induire la destruction de l'être aimé. Presque une figure de style de la tragédie et du romantisme. Pour préserver cet amour de la jalousie et de la méchanceté des autres, l'hominine adulte, avec plus d'expérience, préconise la plupart du temps que la relation demeure secrète. Les quelques enquêtes et témoignages sur ce sujet montrent que cette option est très largement choisie par les grand-parents et les parents entretenant ce type de relation, et plus largement par les membres de la parentèle. Selon ces mêmes sources, les hominines mâles — grand-pères<ref>En France, la fête des grand-pères est fixée depuis 2008 au premier dimanche du mois d'octobre.</ref>, oncles, cousins et pères<ref>En France, la fête des pères est fixée depuis 1952 au troisième dimanche du mois de juin.</ref> — semblent plus disposés à ''faire l'amour'' à des enfants de leurs parentèles, principalement les petites femelles<ref>Les études et les sondages réalisés en France estiment à plusieurs millions le nombre d'enfants ayant subi des rapports incestueux. Environ 80% sont des petites femelles.</ref>. Les adultes femelles sont plus distantes<ref>En 2008, le film ''Savage Grace'' retrace la vie de la richissime étasunienne Barbara Daly Baekeland qui, décidée à "soigner" son fils de son homosexualité, le contraint à avoir des relations avec des prostituées. Puis, pendant quatre années, elle le force à avoir des relations sexuelles incestueuses. Antony tue sa mère en 1972.</ref>. N'en déplaise aux adeptes du slogan "''Un papa. Une maman''", être en famille est un risque supplémentaire de sexualités contraintes et, statistiquement, mieux vaut donc une famille monoparentale. | + | Soit la sexualité recherchée par l'adulte se fait à hauteur d'enfant, c'est-à-dire que le corps de cellui-ci est érotisé en fonction de son âge, soit elle ramène cela à une sexualité d'adulte avec les pratiques qui sont les siennes. Avec, dans les deux cas, les conséquences psychologiques et les séquelles physiques qu'elles peuvent engendrer, mais, la sagesse populaire rappelle qu'à son paroxysme, l'amour peut induire la destruction de l'être aimé. Presque une figure de style de la tragédie et du romantisme. Pour préserver cet amour de la jalousie et de la méchanceté des autres, l'hominine adulte, avec plus d'expérience, préconise la plupart du temps que la relation demeure secrète. Les quelques enquêtes et témoignages sur ce sujet montrent que cette option est très largement choisie par les grand-parents et les parents entretenant ce type de relation, et plus largement par les membres de la parentèle. Selon ces mêmes sources, les hominines mâles — grand-pères<ref>En France, la fête des grand-pères est fixée depuis 2008 au premier dimanche du mois d'octobre.</ref>, oncles, cousins et pères<ref>En France, la fête des pères est fixée depuis 1952 au troisième dimanche du mois de juin.</ref> — semblent plus disposés à ''faire l'amour'' à des enfants de leurs parentèles, principalement les petites femelles<ref>Les études et les sondages réalisés en France estiment à plusieurs millions le nombre d'enfants ayant subi des rapports incestueux. Environ 80% sont des petites femelles.</ref>. Les adultes femelles sont plus distantes<ref>En 2008, le film ''Savage Grace'' retrace la vie de la richissime étasunienne Barbara Daly Baekeland qui, décidée à "soigner" son fils de son homosexualité, le contraint à avoir des relations avec des prostituées. Puis, pendant quatre années, elle le force à avoir des relations sexuelles incestueuses. Antony tue sa mère en 1972.</ref>. N'en déplaise aux adeptes du slogan "''Un papa. Une maman''", être en famille est un risque supplémentaire de sexualités contraintes et, statistiquement, mieux vaut donc une famille monoparentale. |
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Version du 27 février 2021 à 00:00
Amour (убов en macédonien - amor en nissard). Principale invention des hominines[1] pour asservir l'autre et/ou soi-même.
[En cours de rédaction]
SommaireÉtymologieDans la langue française moderne et standardisée, le terme amour dérive de la forme latine amor avec le sens de "sentiment d'affection profonde" pour une personne ou une chose. Il est attesté dès le IXème siècle après JCⒸ[2] dans les pratiques linguistiques du continuum gallo-roman sous la forme amur. Les chemins de l'évolution de son orthographe et de sa prononciation divisent encore les linguistes qui y voient une influence des pratiques linguistiques du continuum occitano-roman ou celles du gallo-roman de Champagne qui, chacune, sont des vecteurs importants du thème de l'amour dans les expressions artistiques des troubadours et des trouvères[3]. L'analyse des différentes sources écrites permettent d'établir que les formes amor, ameur et amur sont employées dans l'aire linguistique gallo-romane jusque dans le courant du XIVème siècle. Malgré la constitution progressive d'un français standardisé, ces formes orthographiques persistent dans les pratiques régionales orales et écrites. Comme pour rien, le genre grammatical de amour s'est modifié au fil des siècles. Les usages actuels sont d'employer le masculin pour le singulier et le féminin pour le pluriel. Par exemple, un amour envahissant, des amours meurtrières. Même si le terme amour s'est imposé face aux autres, tous ont donné lieu à des formes verbales, adjectivales ou adverbiales. Ainsi, s'amouracher, s'enamourer et amourer signifient "éprouver de l'amour", c'est-à-dire être dans un état d’amourachement ou d’enamourement. Être amourable permet ainsi de construire amourablement des amouracheries, des amourettes ou des amouries[4]. Univers amourien
L'histoire de l'amour est celle d'un asservissement. Par un jeu de miroir à facettes, les processus sont très proches de ceux de la haine. Autant dans leurs dimensions dévastatrices que dans leurs motivations ou leurs ressorts. La définition communément admise de amour est qu'il s'agit d'un sentiment profond d'attachement d'une personne à autre chose qu'elle. L'intensité de l'amour — et de la haine[6] — est telle qu'elle justifie la démesure qu'il peut engendrer chez les hominines. Il est mis sur un piédestal et tous les autres sentiments sont de fait relativisés. Chaque hominine éprouve cette attirance, se laissant porter vers l'autre. Selon cette définition, l'amour est un acte individuel qui ne nécessite pas obligatoirement une réciproque. L'amour absolu ne réclame rien. Cette définition de l'amour entretient l'illusion que le sentiment d'amour est immanent aux hominines et qu'il émane de soi vers l'autre, une vision biologico-essentialiste de l'amour qui en fait un sentiment naturel. Pour la protivophilie, il n'en est rien. Dans la plupart des sociétés d'hominines, passées et présentes, l'amour est un comportement social. Il est une construction complexe qui incite chaque hominine à penser que l'auto-réalisation passe par l'amour d'autre chose que soi-même. Pour se faire, le procédé principal consiste, d'une part, à utiliser les données biologiques qui permettent d'expliquer les "attirances physiques" et les "complicités corporelles" pour les culturaliser et, d'autre part, des faits culturels ou des complicités intellectuelles qui sont naturalisés. L'argumentaire est quelque peu tautologique : Un peu comme répondre "Aimer" à la question de savoir ce qu'est l'amour, et ne pas avoir d'autre réponse à donner que "Amour" à celle de savoir ce qu'est aimer ! Les plus optimistes des hominines prétendent que l'amour n'existe pas. Agréable illusion qui ne survit pas à la réalité des choses car ses méfaits sont bien réels et touchent la grande majorité des hominines. De la même manière que l’inexistence des races n'est pas synonyme de disparition automatique du racisme. L'univers amourien est fait de récits tragiques et peuplé de personnages fantasmés. Au cours de leur histoire, les hominines ont patiemment construit un imaginaire de l'amour qui englobe l'ensemble de l'existant. Celui qui l'on porte ou que nous porte une divinité supérieure (!), celui que l'on voue à un collectif, à un "nous" auquel on pense appartenir, celui que l'on consacre à une structure familiale et celui tourné entièrement vers une personne en particulier. Le discours sur l'amour est diffusé, depuis maintenant quelques millénaires, à travers une multitude de formes artistiques. La littérature, la poésie, le dessin, la chanson, la sculpture, le cinéma, et tant d'autres, sont gorgés du thème de l'amour. Impossible d'y échapper. Les formes littéraires que sont la politique, la philosophie et la religion[7] sont elles aussi imprégnées d'exaltation du sentiment amoureux. Bien évidemment, l'amour y est abordé sous un angle favorable. Il est présenté comme le sentiment suprême. Quasi rien sur ses dimensions asservissantes. Pourtant, derrière cette approche déformante se cache un monceau d'ordures. Au nom de l'amour, les hominines n'ont de cesse de contrôler, de violenter ou de tuer l'objet de ce même amour. Avec la haine, l'amour est l'autre grande cause de mortalité sentimentale prématurée chez les hominines. Les adeptes de l'amour le pensent comme étant l'opposé absolu de la haine. Rien n'est plus faux. Ces deux sentiments sont intimement liés, l'un procédant de l'autre : il est possible d'être haineux par amour alors qu'être amoureux par haine semble plus alambiqué. Tout deux relèvent de processus similaires dans leurs fonctionnements et leurs conséquences. Penser que seule la haine produit des larmes et de la tristesse, des morts et des guerres, des destructions et des mensonges, c'est se tromper sur ce qu'elle est. Et surtout sur ce qu'est l'amour. RéalicidesLes écrits des mythologies des moïsiens[8] relatent des histoires d'une divinité qui réclame à l'un des hominines de sacrifier son enfant pour démontrer l'étendue de son amour, elle déclenche des cataclysmes ou génocide des populations entières pour prouver aux autres hominines qu'illes sont l'objet de son amour. Les christiens[8] puis les mahométiens[8] réécrivent ces fables et font de la divinité une entité plus attentionnée. "Dieu est amour" proclament les nouvelles mythologies. Ainsi, la divinité est exonérée de toute mauvaise intention et agit par amour désintéressé. Dans un rapport aussi décalé que celui de l'amour d'un éleveur vis à vis du bétail qu'il destine à l'abattage. La relation entre les hominines et leur divinité unique est platonique. Chacun reste à sa place, à bonne distance. L'Un regarde sans intervenir, les autres font ce qu'illes peuvent pour répondre à son amour. Selon la protivophilie, il n'y a pas à s'inquiéter de cet amour divin étant donné que dieu n'existe pas, mais tout est à craindre de celui que les hominines portent au divin. Les adeptes de ces mythologies veulent répandre leurs croyances et annoncer à l'ensemble des hominines la bonne nouvelle : l'amour divin. Pour se faire, et face à l'importance de leur mission, illes utilisent tous les moyens de persuasion. Illes aident les hominines hésitant à choisir en brûlant et détruisant les reliques de leurs religions, illes libèrent les hominines de leurs anciennes croyances en les tuant, illes tranchent dans les débats théologiques sur l'amour divin en massacrant celleux qui divergent, illes remettent sur la bonne route les personnes récalcitrantes et les protègent de ce qui pourrait les détourner de l'amour divin. Les cas les plus difficiles bénéficient d'une purification par le feu. Il ne s'agit pas de l'amour que dieu porte aux hominines mais de celui que celleux-ci lui portent. Il faut répondre à cet amour divin par un amour du divin. Il faut apprendre qu'il n'est pas facile d'être aimé. L'amour vis à vis du divin est le seul autorisé. Le reste n'est rien. L'attirance entre deux hominines n'est pas considérée comme un sentiment suffisamment pur, parfois dégradé un peu plus par le sexe, et n'est pas digne d'être qualifié d'amourien. Dans le domaine profane, le terme amour désigne le "rut animal". Dans ce sens il s'emploie au masculin, que ce soit au singulier ou au pluriel.
Les hominines ne se laissent pas toujours convaincre de l'intérêt de l'amour divin. Derrière son prétendu désintéressement, illes voient ce qu'illes doivent être contraints d'admettre pour être dignes de cet amour, ce à quoi illes doivent renoncer. Face à un certain entêtement, les adeptes des mythologies christiennes et mahométiennes en font parfois tomber quelques unes. La méthode la plus simple pour mettre fin aux hésitations restant de pourchasser ou de tuer celleux qui refusent cette relation. L'amour demande des sacrifices. Quoi de mieux pour déclarer sa flamme divine qu'un bûcher d'hominines ? Mais rien de mal à cela étant donné que la vie éternelle est promise après la mort par la littérature religieuse. Un retour à la "case Départ" sans passer par la "case Prison" en termes théologiques. Malgré sa forte incidence sur la mortalité prématurée chez les hominines, la promesse d'une vie après la mort a néanmoins fait reculer le nombre de tentatives de suicide de celleux qui, bien décidés à mettre fin à leur vie, hésitent à deux fois avant de passer à l'acte[10]. L'amour du divin s'est propagé, telle une IST[11], sur tous les continents. Au fil des siècles et de l'épée les adeptes des mythologies christiennes et mahométiennes clament leur amour et privilégient cette relation sur tout le reste. Dans la joie, illes se joignent aux conquêtes et aux massacres des hominines qu'illes tentent d'instruire au plaisir de mourir par amour, illes pourchassent sans relâche celleux qui doutent de cet amour et de la nécessité de s'oublier dans une telle relation, et s'acharnent à débusquer les amours consacrées à d'autres. Mais l'amour du divin ne laissent pas seulement des cicatrices et des cendres sur les corps convertis, quelques adeptes pratiquent sur elleux-même des formes d'automutilation ou d'érotisme masochiste : Scoptes russes qui se coupent les organes génitaux et s'amputent des seins[12], flagellants qui obtiennent l'extase en se fouettant le corps[13], mahométiens qui se mettent en sang collectivement[14], etc. Si "les voies du seigneur sont impénétrables", sa voix non plus n'est pas très claire sur les meilleures méthodes à utiliser pour ce conformer à son amour. Les quelques recommandations émises par trois fois en quelques milliers d'années ne sont pas suffisantes et, de plus, contradictoires[15]. Pas facile d'entretenir une relation lorsque l'une des deux parties opte pour le mutisme. Les hominines cherchent en permanence à se rassurer sur un sujet : Sont-illes toujours l'objet de l'amour divin ? Les mythologies moïso-christo-mahométiennes façonnent l'amour, elles forgent les principales caractéristiques de ce sentiment qualifié de suprême. Selon elles, l'amour proposé est au-dessus de tout et place l'être qui s'en réclame au centre de tout. Son amour est, par essence, irrépressible et non négociable. Il n'est jamais sans conditions mais doit être accepter de manière inconditionnelle. La perte de discernement est indispensable car porter un avis sur un amour revient, du point de vue de cellui dont émane ce sentiment, à en nier la profondeur. Rien de plus vexant. La moindre critique est une remise en cause. Rien de plus blessant. Il est inacceptable de froisser l'amour. Impossible d'imaginer qu'il soit aussi porté pour des raisons moins louables. Cette suspicion entraîne systématiquement la colère et justifie la démesure des réactions face à un rejet de l'amour proposé. Le qualificatif d'infidèle n'est-il pas la pire des choses ? Violence des sentiments et violences sentimentales sont inséparables. En ce qui concerne cellui qui reçoit l'amour, ille se doit d'être attentif à ses choix lorsque ceux-ci peuvent ébranler le sentiment amourien. Ille se doit d'être à l'écoute permanente afin d'être au plus près des conditions optimales de l'amourie. Même s'ille ne l'a pas choisi, ille ne peut que recevoir ce sentiment comme une marque profonde de respect et d'attention, un véritable honneur. L'amour se mérite et pour cela il faut être prêt à se plier en quatre. Quitte à en mourir. La promesse d'un amour éternel ne peut être rompue si l'objet de l'amour reste dans les marges de ce qu'il est attendu de ellui. Éternité est l'anagramme de Étreinte, et ce dernier peut s'entendre dans le sens d'enlacer fortement une personne ou de contrainte extérieure. La menace est à peine déguisée, mais dans l'univers amourien elle prend le sens de promesse. Dieu propose la vie et l'amour éternels à celleux qui acceptent son amour, que les autres aillent brûler en enfer. Une promesse digne d'un dialogue de film où, alors que les personnages sont à deux doigts d'une mort certaine, l'un d'elleux dit à l'autre : "Je te promets, il ne va rien t'arriver. Je t'aime !"[16]. Le mensonge est évident et la menace indirecte est que s'il n'y avait pas cet amour, l'autre était voué à un avenir terrible. Peut-être tout simplement abandonné ? Même si elle n'engage que celleux qui la reçoivent, la promesse est une part importante du pacte amourien. Celle-ci est le principal prétexte de l'être aimant et le principal moteur de l'être aimé dans une relation déséquilibrée. L'amour implique une subordination. Évidemment, l'être aimé n'est pas en état de passivité. Ille diffuse son amour, avec ses maigres moyens, et fait savoir à qui veux l'entendre, toujours un peu maladroitement, à quel point cet amour est immense et réciproque. Après avoir inventer un créateur à la réalité, avec l'amour les hominines optent pour le déni de réalité et œuvrent à l'amour de ce créateur fictif. L'amour divin est un vrai réalicide.
GénocidesLa vision de l'amour divin s'est transférée dans les relations entre hominines, plus précisément entre les groupes d'hominines. Après la figure lointaine et évanescente de la divinité, l'amour est dorénavant dévolu aussi à un "Nous" terrestre et illusoire. Historiquement, les hominines s'agglomèrent en sociétés stables qui se différencient les unes des autres par des critères très relatifs que sont la géographie, les pratiques linguistiques, les rites culturels ou religieux, l'organisation sociale, etc. Aucun de ces critères n'est réellement pertinent en soi car, les formes d'organisation des hominines étant d'une telle diversité, ils ne sont pas opérant de la même manière selon les endroits et les époques. Les modalités sont multiples : la proximité géographique est parfois un motif entre deux groupes d'hominines pour se différencier, bien plus que l'éloignement, une langue commune n'est pas une nécessité absolue et des sociétés multilingues existent, comme d'autres ne se fondent pas sur une unique mythologie religieuse, etc. L'anthropologie retrace cette multiplicité de façons de définir un "Nous" collectif. Basiquement, une société se définie elle-même en tant qu'hominines et dénie cela aux hominines des autres sociétés et, dans des sociétés complexes, l'auto-définition ne se résume pas au fait d'être ou pas des hominines mais s'exprime dans de "savantes" subdivisions internes. Être hominine ne suffit pas pour faire partie du "Nous". Dans une approche protivophile, il n'est pas exact de réduire les massacres de masse contre les moïsiens d'Europe et, plus récemment, contre les tutsis du Rwanda à l'expression d'une haine à leur encontre. Illes sont les victimes collatérales de l'amour, celui porté à une prétendue "race germanique" et à un fantasmé "Hutu Power". Les victimes directes de ces amours sont celleux qui sont reconnus authentiquement germanique ou hutu, et donc intégrés dans le "Nous". De fait, illes sont les victimes collatérales de la haine contre les moïsiens et les tutsis. Dans l'univers amourien, le "Point Godwin" se fait "Point G"[19], comme "Génocide". Mais il ne sert à rien de réduire le sentiment amourien des hominines à ces situations extrêmes. Ses méfaits sont tels que l'histoire des hominines regorge d'histoires d'amour qui, comme le rappellent des troubadours contemporains, "finissent mal en général"[20]. Piocher au hasard dans le grand sac à vomi collectif qu'est l'histoire des sociétés d'hominines, c'est l'assurance d'en ressortir des morceaux de choix. Les frontières sont des alignements de cadavres encore tièdes et les territoires des hominines de grands cimetières aux tombes béantes. Qu'elles soient stratifiées en tribus, en clans ou en classes, les sociétés d'hominines inventent des abstractions collectives. Les plus contemporaines s'appellent pays, États, empires, peuples ou nations. Par amour pour elles, des millions d'hominines ont accepté d'y laisser la vie. Et d'en prendre tout autant. Ces "Nous" offrent l'illusion d'un amour collectif envers chaque hominine les composant. Cet amour doit être honoré et l'infidélité est gravement punie. Se faire tuer par amour n'est pas la seule option, il est aussi possible de se faire blesser ou mutiler. Pour chaque hominine, sa propre vie importe moins que l'amour du collectif qui lui apporte un sens à sa vie. Un tel abandon amourien est tragique mais, d'évidence, "l'amour rend aveugle"[21].
L'idée de l'amour du collectif singe celle de l'amour du divin. Là encore, les hominines inventent une abstraction supérieure à qui illes prêtent vie et à laquelle illes se subordonnent. Cet amour collectif est une construction intellectuelle qui permet, en retour, de justifier l'amour porté au collectif. Même si cela peut prêter à sourire, l'intensité de ce sentiment n'est pas à négliger. L'exaltation du "Nous" se fait à travers des proverbes et sentences, des productions artistiques et intellectuelles qui regorgent d'invitation à se plier car "le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point"[21]. Cet amour atteint des sommets lorsque les hominines qui s'en réclament se sentent en danger dans leur fantasme amourien. À la grande différence de l'amour du divin qui n'a pas pour conséquence la mort de ce dernier, l'amour du collectif engendre parfois l'affaiblissement ou la disparition de ce même collectif tant aimé. Pour titiller le "Point G" de cet article, rappelons que, par amour, les bouffées de chaleur hitléristes ont causé la mort et la misère de plusieurs millions d'hominines de la soit-disant "race germanique" et que le "Hutu Power" s'est soldé par l'effondrement de ce pouvoir, le massacre et la fuite de centaines de milliers d'hominines hutus hors du Rwanda. À son paroxysme l'amour est auto-destructeur[23]. L'épectase n'est plus un rapprochement vers la divinité mais une mort subite collective au moment de l'orgasme[24]. Est-ce cela les "miracles de l'amour" ? "Le plus grand miracle de l'amour est de rendre l'impossible possible"[21] affirment avec force les adeptes de l'amour, sans voir que c'est bien là le drame. Dans Killer, l'un de ses rares ouvrages consacré à l'univers amourien, le polémologiste Élie "Booba" Yaffa rappelle les mécanismes basiques qui amènent à ces amours génocidaires.
Que des hominines choisissent de perdre la vie ou de se suicider par amour de leur région, de leur pays ou de toute autre chimère collective, est une chose, mais qu'illes décident de faire sombrer les autres est une chose discutable. D'autant plus que des recherches ont permis de mettre en évidence que le suicide individuel n'est pas mécaniquement létal pour l'entourage. Mais le "crime passionnel" bénéficie souvent de "circonstances atténuantes". Refuser cet amour n'est pas sans risque. Malgré l'accusation de trahison qui plane sur elleux, de nombreux hominines tentent d'échapper à ce qui est attendu d'elleux. Fuir l'amour pour ne pas y prendre part. Et surtout ne pas se faire prendre[26].
L'amour du "Nous" consacre dans le domaine profane ce que l'amour divin avait prédéfini comme étant le sentiment absolu : Le sacrifice de soi ou d'autrui, la perte de discernement ou de contrôle, la subordination ou l'asservissement, l'aspect monomaniaque, la jalousie et l'exclusivisme, l'obsession de la perte et l'oubli de soi. Tous syndromes de cette pandémie, ils touchent chaque hominine avec des intensités et des modalités différentes. Pour les adeptes de ces amours, profanes ou sacrées, ces états ne sont pas problématiques et sont même valorisés par une inversion rhétorique : les protestations contre ces viols d'amour sont masquées par la viole d'amour[28] qui accompagne mielleusement le sentiment suprême. L'exaltation de l'amour parle plutôt de sensation de bien-être, de plénitude, d'abandon libérateur, de sens de la vie et de partage ! "Amour et mort rien n’est plus fort. Rien ne résiste à l’amour ni à la mort."[21] est un véritable leitmotiv. Ce qui enchante les adeptes de l'amour du "Nous" a de quoi sérieusement inquiéter celleux qui n'y entendent rien. HomininicidesContrairement aux amours divin et collectif, la troisième catégorie de l'univers amourien est une affaire entre hominines et non plus avec une abstraction ou un imaginaire. Le résultat n'en est pas moins tragique. Cette conception de l'amour se calque sur les deux autres et vise plus particulièrement l'entourage social immédiat de chaque hominine. Dans la plupart des sociétés actuelles, les espaces sociaux de proximité sont la parentalité et l'adelphité[29], espaces dans lesquels les amours homininicides se déroulent. Les normes sociales différencient la parentalité des hominines mâles de celle des femelles, et l'adelphité se subdivise en fraternité et sororité. La différentiation binaire des hominines entre mâles et femelles engendre des situations, des comportements et des attentes différents. Chez les hominines, la gestation est d'environ 9 mois. Contrairement à d'autres bilatériens[30], tel le crapaud accoucheur, la femelle hominine porte en elle la progéniture à venir. S'illes n'ont pas interrompu le processus, les personnes génitrices voient la naissance d'un petit animal incapable de la moindre autonomie pendant encore quelques années. Lors de cette période, il est nécessaire de pallier à ce que l'hominine en devenir ne peut faire sans aide. Il faut le nourrir et l'hydrater, lui apprendre à se déplacer en bipède et établir des moyens de communication communs. En tant que processus biologique de cette espèce, le but est de parvenir ainsi à faire concorder acquisition de l'autonomie et maturité reproductive. Pour se faire les sociétés d'hominines ont mis au point des méthodes d'apprentissage reposant sur l'imitation et l'initiative, toutes deux présentes aussi chez de nombreuses autres espèces animales. L'une des particularités des hominines — et quelques autres primates — est de ritualiser des faits biologiques en leur donnant un aspect culturel, passant de la nourriture à la gastronomie, de la reproduction à la sexualité, de la parentalité à l'amour parental ou adelphique, etc. Et inversement, les dimensions culturelles chez les hominines sont si présentes qu'elles parviennent à modifier partiellement l'aspect biologique. Si un infanticide n'est pas pratiqué, les dix premières années de leur immersion dans l'existant sont déterminantes pour les nouvels hominines[31]. En échange de nourriture et de conditions générales de vie qui tentent de les maintenir en vie, les jeunes hominines apprennent les codes sociaux de leurs parentèles. Avec plus ou moins de douceur, selon les personnes, les méthodes ou les époques, avec plus ou moins de violence pour les jeunes, selon leurs facilités ou leurs volontés à acquérir ces cadres sociétaux. Il y a parfois des morts. Le dressage, ce n'est pas rien.
Pendant ces années d'enfance, les jeunes hominines sont en situation de dépendance presque totale[33]. Comme cela fonctionne très bien avec quelques graines pour des volatiles ou des friandises pour des souris de laboratoire, ce que les biologistes appellent le "circuit de récompense"[34] est sollicité en permanence pour ce dressage d'hominines. Ce même circuit qui entre en jeu dans les amours divin et collectif mais, dans le cas des amours homininicides il concerne non plus des satisfactions secondaires mais des besoins vitaux tels que le soin, la nourriture et l'eau. Même s'illes n'ont rien demandé, cette relation crée un sentiment d'attachement entre les personnes enfantées et les génitrices. À ces données biologiques viennent se mêler les liens intellectuels et intimes qui se tissent entre elleux au cours de toute cette période de dressage. La relation qui naît de cette situation est complexe et déséquilibrée. Ces amours homininicides se composent, d'une part, de l'amour parental à destination des enfants, et de l'autre, de l'amour infantile porté aux parents. Quand à l'adelphité elle est construite comme étant un sentiment entre chaque hominine la composant et dans un rapport individuel à chaque membre de la parentèle à laquelle illes sont liés. Du point de vue de l'espèce, cette configuration sociale fournit un supplément indispensable à la survie de chaque individualité. Animaux sociaux, les hominines sont astreints à vivre collectivement pour survivre et se reproduire. En effet, prédateur de petite envergure, l'hominine solitaire s'expose à bien plus féroces ou organisés qu'ellui parmi les animaux et, biologiquement différent du puceron ou du dragon de Komodo qui se reproduisent par parthénogenèse[35], ille a nécessité de trouver partenaire. Tâche d'autant plus difficile que, contrairement aux escargots hermaphrodites[36], il doit y avoir complémentarité sexuelle. La parentèle est la plus petite forme d'organisation sociale dans la plupart des sociétés d'hominines. Cet article se situe dans un contexte où les mythologies moïso-christo-mahométiennes sont la norme et, afin d'éviter les généralisations excessives, la protivophilie se penche sur l'exemple d'une région particulièrement intéressante pour elle, la ville de Nice et ses alentours. Et plus largement le pays auquel elle est rattachée depuis 1860, la France. Dans ces parties du monde, même si cela change de plus en plus, la structure familiale basique se compose le plus souvent d'un foyer de deux hominines, un mâle et une femelle, et de leur progéniture. Il arrive que le domicile familiale abrite aussi des membres encore en vie de la génération plus ancienne. Même si elle se voit comme une entité à part entière, cette formation de base s’entrecroise avec d'autres dans une structure plus large, la parentèle, qui assemble entre eux les cousinages. C'est dans cet environnement familial que se diffusent les discours amouriens. "Sans pain, sans vin, l'amour n'est rien"[21]. Plutôt que d'assumer pleinement l'acte égocentré qu'est le fait de mettre au monde volontairement, les amours des personnes génitrices construisent un imaginaire dans lequel elles disent éprouver un sentiment d'attachement démesuré à leur progéniture. Pour elle, elles sont prêtes à se sacrifier et ces amours se veulent inconditionnelles. Mais, en retour, elles appellent à une réciprocité. Si l'amour des parents est présentée comme une évidence, voire biologique, celui des enfants se doit d'être à la hauteur. Ces amours ne se questionnent pas, il ne s'agit pas ici de "tomber amoureux" mais d'"être en amour". Le mélange entre processus biologiques et constructions culturelles est évident. Même si parfois des incartades et des impairs sont commis par les hominines dans de telles relations, il n'en reste pas moins que tout est néanmoins fait "par amour". Dans les alentours de Nice, les enfants d'hominines apprennent très tôt ce que l'on attend d'elleux dans cet univers amourien. L'amour parental se calque sur celui "existant" entre la divinité et ses créatures et celui des enfants sur l'amour des hominines vis-à-vis de cette illusion créatrice. Dans un sens, l'amour est sans limite, attentif mais pouvant être exprimé durement, avec une condescendance amicale et des attentes indiscutables, dans l'autre il est fait de déférence prudente, de désirs orientés par peur de la perte et d'attentes indiscutées. Pour leur apprentissage amourien, les jeunes hominines disposent d'une somme considérable de contes, chansons, fables et autres histoires qui en parlent. Sortis tout droit de l'imagination d'hominines adultes. Le sujet est décliné jusqu'à la nausée. "Mange ta soupe !" Simplifié afin d'être accessible aux plus jeunes, l'argumentaire se réduit souvent à : "L'amour c'est gros... heu... comme une montagne". L'absurdité de cette affirmation certifie la dimension irrationnelle du sentiment amourien. Si l'enfant répond une autre absurdité comme "Moi je t'aime comme... heu... des champs de montagnes", il est admis qu'ille a réussi son apprentissage. Difficile à croire sans en rire pour qui ne l'a jamais vécu, mais de tels échanges insensés entre parents et enfants sont pour elleux des moments intenses de leurs relations. L'émotion est à son comble. Edgar Allan P. — un auteur étasunien du XIXème siècle dont nous tairons le nom complet pour lui éviter le ridicule et le lynchage sur les réseaux sociaux — affirme même que l'on ne peut "trouver de mot d'amour plus grand que celui-ci : Maman"[21] ! La poésie est toujours d'un grand renfort pour l'argumentaire amourien.
Comme le montrent très bien les études sur l'esclavage dans les sociétés d'hominines, l'acceptation de sa condition, avec tout ce que cela implique d'inconfort et de violence, est la plus courante des façons de se maintenir en vie, voire d'arriver à l'émancipation. S'échapper de l'enfance est quasi impossible. Sauf à mourir. Lorsque les conditions matérielles sont satisfaisantes et que les hominines en charge des enfants ne se laissent pas emporter par l'intensité des sentiments, l'apprentissage peut être fait sans trop de contraintes ou de violences. Le dicton "Tout par amour, rien par force"[21] résume très bien ce qu'est la méthode douce : Un mélange de "circuit de récompense" et de subterfuges pour faire accepter. Les méthodes plus coercitives, même si elles sont contestées, sont les plus répandues. Elles sont très violentes pour des parents qui, par amour de leur progéniture, sont contraints d'user de cris et de coups pour aider les jeunes hominines à mieux se sentir dans leurs amours. Combien de gifles, de coups de ceinture, de baguette ou de nerf de bœuf pour apprendre ce qu'est l'amour ? Combien de punitions, de réclusions ou d'humiliations pour mesurer l'intensité du sentiment amourien ?[38] Aucune haine dans cela, bien évidemment, mais un acharnement à sauver l'enfant de ellui-même. Tout au plus, selon les plus traditionalistes, des formes de bizutage pour l'entrée dans l'univers amourien. L'amour est une attention permanente. La tautologie est facile : Lorsque l'on aime une personne, on sait ce qui est bien pour elle, et c'est pour cela qu'on l'aime. Que ce soit à Nice, en Macédoine ou dans le reste du monde, les relations sexuelles sont réglementées au sein des parentèles. Les codes diffèrent un peu d'un endroit à l'autre, mais généralement cela n'est pas encouragé entre des personnes ayant des liens de parenté directs. Il est irrecevable socialement qu'une personne puissent entretenir de telles relations avec ses enfants ou ses petit-enfants. L'amour d'un père ou d'une mère ne peut se satisfaire par des complicités charnelles et érotiques. En France, par exemple, les autorités accordent quelques dérogations pour des mariages entre des cousinages proches mais refusent d'accepter les unions entre des personnes d'ascendance directe. Selon les textes, il s'agit de rapports incestueux. Jusque dans les années 1970, gendre, bru, belle-mère et beau-père ne sont même pas autorisés à se marier entre elleux, ni entre elles ou entre eux, alors qu'illes n'ont pas de liens biologiques mais sociaux[39]. Malgré le cadre législatif, il n'est pas formellement interdit d'entretenir des relations sexuelles incestueuses entre adultes mais la discrétion reste la garante d'une vie sociale apaisée. Les complications administratives arrivent si il y a une naissance de ces amours. Mais de telles situations amouriennes sont beaucoup plus rares que celles qui impliquent des hominines adultes et leurs progénitures lors de l'enfance[40]. Il ne s'agit pas à proprement dit de pédophilie[41], dans le sens d'attirance sexuelle pour les enfants en particulier, mais d'amour pour tel ou telle de ses enfants. Il serait insultant de considérer cela comme un acte de haine, au même titre qu'une maltraitance qui vise volontairement à faire mal ou de la torture, alors que c'est l'amour absolu et inconditionnel qui motive ces gestes incestueux. En effet, l'hominine en amour charnel pour sa descendance reprend le schéma classique qui pose le sentiment amourien au dessus de tout autre chose. L'être aimé est réceptacle d'un débordement qu'ille ne peut refuser, ille est dans la situation de l'hominine vis-à-vis de l'amour divin, alors que cellui qui proclame son amour se trouve en position de force, celle de la divinité qui impose son amour. La relation est déséquilibrée surtout lorsqu'elle implique des hominines enfants qui ne sont pas encore en capacité d'en mesurer les termes exacts. Si l'enfant a moins de trois ans, il paraît évident que les risques d'incompréhension sur le sens réel des mots sont incontournables. S'ille est plus âgé, ce risque reste tout aussi important même si l'acquisition d'un langage commun donne l'illusion du contraire. L'adulte déclame que "L'amour se passe de mots"[21] pour justifier l'absence de consentement clair. Mais dans l'univers amourien, le consentement de la personne aimée n'est pas une condition explicite. Pour cela, il n'est pas exclu de devoir la contraindre par la force de la "Méthode Coué" du bienfait de ces relations sexuelles, jusqu'au viol, ou alors de la subjuguer avec douceur par des mots, des attentions et des contacts sensuels pour obtenir des retours érotiques à cet amour.
Soit la sexualité recherchée par l'adulte se fait à hauteur d'enfant, c'est-à-dire que le corps de cellui-ci est érotisé en fonction de son âge, soit elle ramène cela à une sexualité d'adulte avec les pratiques qui sont les siennes. Avec, dans les deux cas, les conséquences psychologiques et les séquelles physiques qu'elles peuvent engendrer, mais, la sagesse populaire rappelle qu'à son paroxysme, l'amour peut induire la destruction de l'être aimé. Presque une figure de style de la tragédie et du romantisme. Pour préserver cet amour de la jalousie et de la méchanceté des autres, l'hominine adulte, avec plus d'expérience, préconise la plupart du temps que la relation demeure secrète. Les quelques enquêtes et témoignages sur ce sujet montrent que cette option est très largement choisie par les grand-parents et les parents entretenant ce type de relation, et plus largement par les membres de la parentèle. Selon ces mêmes sources, les hominines mâles — grand-pères[43], oncles, cousins et pères[44] — semblent plus disposés à faire l'amour à des enfants de leurs parentèles, principalement les petites femelles[45]. Les adultes femelles sont plus distantes[46]. N'en déplaise aux adeptes du slogan "Un papa. Une maman", être en famille est un risque supplémentaire de sexualités contraintes et, statistiquement, mieux vaut donc une famille monoparentale. Du point de vue de l'hominine adulte, sa sincérité amoureuse n'est pas à mettre en doute dans sa relation incestueuse adulte/enfant. La perte de discernement, inhérente aux définitions de l'amour, est à l'œuvre lorsque l'adulte mélange ce qu'ille croit comprendre des ressentis et des attentes de l'enfant avec ses propres désirs et projections. La problématique du consentement est balayée au motif que tout pouvait laisser croire à de la réciprocité. Les différences entre adultes et enfants ne permettent pas une égalité dans les capacités à appréhender les choses et leurs conséquences. L'ascendance psychologique des adultes sur les enfants est une forme de contrôle. "Rien n'arrête l'amour"[21] mais refuser l'idée même d'un "amour impossible" c'est risquer d'être dans le déni d'amours imposées. Rien n'empêche d'attendre alors que l'enfant soit adulte pour établir une relation sexuelle si les deux le désirent vraiment[48]. La protivophilie préconise, avec un peu d'imagination, l'utilisation de sex-toys appropriés pour se substituer à l'être aimé et entretenir en solitaire les "feux de l'amour". Dans un contexte adelphique, les amours se vivent différemment et une hiérarchie s'impose entre eux. La valorisation des liens entre les enfants n'est pas à la hauteur de celle réservée aux amours parentaux. En effet, si la biologie des hominines permet d'avoir plusieurs frères et sœurs, elle ne peut en revanche offrir plus de deux géniteurs à chaque individualité. Pour la sociologie la perte d'un frère ou d'une sœur se compense, peut-être, par une nouvelle naissance mais cela n'est pas possible pour les personnes génitrices qui ne sont pas biologiquement interchangeables. La situation d'adelphité vient néanmoins bousculer la définition "classique" de l'exclusivité en amour car, si dans un sens celui-ci est destiné aux deux personnes génitrices, dans l'autre il se divise en autant d'enfants. Les équilibres sont fragiles. Comment chaque enfant doit-ille alors se comporter avec les autres membres de l'adelphie ? Concurrence, solidarité ou complémentarité ? L'imaginaire des mythologies moïso-christiennes relate l'histoire de la première fratrie, Abel et Caïn, issue des relations sexuelles entre Adam et Ève[49]. L'aîné, Caïn, tue son jeune frère parce que celui-ci semble être le préféré de leur génitrice et de la divinité. L'amour n'est pas une affaire de partage. Certaines mythologies précisent que c'est par amour pour Lilith, la première compagne de leur père Adam, que les deux frères se disputent à mort. Pour son acte, Caïn est condamné par la divinité à l'exil et à des conditions matérielles de vie difficiles. Il quitte sa parentèle, accompagné d'Awan, une de ses sœurs. De leur relation sexuelle incestueuse adelphique, illes ont une descendance qui est fondatrice des premières cités d'hominines. Tout ce beau monde est finalement anéanti totalement par la divinité qui ne fait survivre que la seule descendance de Seth, le troisième enfant mâle d'Adam et Ève, et de sa sœur Azura. Malgré toutes les incohérences de ces récits mythologiques, la première parentèle semble prise dans les méandres de l'amour. Une adelphie où la fratrie se déchire pour l'amour parental et divin, et où la sororie est divisée entre chaque frère pour satisfaire la reproduction à une époque "paradisiaque" où illes sont encore les seuls hominines. La région de Nice — et plus généralement le reste du monde habité — est touchée depuis maintenant des siècles par la propagation de ces mythologies incestueuses. Pour autant, l'inceste adelphique n'a pas été institué comme règle de société et les textes sont restés des imaginaires. Les relations sexuelles — tout comme le meurtre — au sein d'une adelphie ne sont pas encouragées, voire blâmées. Lorsque celles-ci se font sous la contrainte, il est facile pour les familles de se voiler la face ou de ne rien faire réellement pour les empêcher, alors que si elles sont choisies elles sont fermement dénoncées. Conformément aux récits mythologiques qui ne sont pas très explicites sur le consentement d'Awan et d'Azura, les amours charnelles pratiquées au sein de l'adelphie se résument le plus souvent aux abus sexuels d'un frère sur une de ses sœurs[50]. L'hypothèse d'un consentement réciproque est rejetée avec horreur par les adeptes des mythologies moïso-christo-mahométiennes pour qui l'amour doit demeurer un acte de soumission de l'une des deux parties concernées. Dans l'univers amourien, il n'est pas concevable de parler d'amour si deux membres de la même adelphie décident de se relationner volontairement ainsi, mais il est admis que, par amour, cet espace puisse être un lieu d'apprentissage de l'asservissement et de la soumission. Si la relation est consentie par les deux personnes, à leur sortie de l'enfance illes devront sans doute continuer à vivre cette relation dans le secret[51]. Ou en entamer une[52]. SingularicidesLes amours singularicides sont un concentré des trois précédents et en sont une caricature. Les abstractions lointaines, divines ou collectives, et les regroupements familiaux et consanguins se font plus discrets dans cet univers amourien. Voire même disparaissent parfois. Ce qui perdure, ce sont les schémas qui construisent l'idéal de cet amour. Cette forme d'amour, que la protivophilie qualifie de singularicide, est souvent notée avec une majuscule afin de la différencier clairement : "C'est l'Amour !"[21]. Il met face à face deux hominines. Si dans l'histoire des hominines les amours réalicide et génocide ont des intensités diverses et des conséquences variables, selon les époques et les lieux, si l'amour homininicide se fissure et s'étiole peu à peu, ou tout du moins se relativise, l'amour singularicide ne cesse de prendre le pas sur tous les autres. Il est sans doute le plus répandu et fait bien plus l'unanimité que les trois autres. Il ne doit pas être confondu avec l'institution sociale qu'est le mariage. En effet celui-ci n'a aucun lien avec l'amour en majuscule. Socialement il est une simple union d'intérêts et l'Amour peut tout aussi bien exister dans son cadre — le hasard ! — qu'en dehors. L'idée que le mariage soit indissociable de l'amour est une chose contemporaine dans les sociétés d'hominines. Cet amour fait de l'ombre aux trois autres qui l'ont toujours regardé avec beaucoup de méfiance. La divinité imaginaire veut bien admettre, voir encourager, que ses créatures s'aiment les unes les autres mais ne peut supporter que deux hominines se vouent un amour qui les détournent d'elle. L'amour génocide ne tolère pas que deux hominines puissent ne pas respecter ou s'opposer à ses illusions collectives[53], et l'amour homininicide se sent amoindri par cette concurrence. L'amour singularicide — ou simplement Singularicide, avec majuscule — est en compétition avec les autres qui n'hésitent pas à s'y opposer, parfois très brutalement. L'histoire des hominines regorge de contes et d'anecdotes qui parlent de cette confrontation[54]. Pour autant, aucun n'ose critiquer frontalement le Singularicide dans ce qui le constitue. L'attaquer ainsi serait prendre le risque d'ébranler leurs propres discours sur l'amour. Le Singularicide met en relation deux hominines dans ce qui s'apparente à un sentiment individuel vécu ensemble. Éprouver de l'amour n'est pas identique à recevoir de l'amour. Dans un cas il s'agit d'emplir l'être aimé de son amour, dans l'autre d'en être le réceptacle. Dans son sens classique, une relation amourienne implique que chaque hominine soit les deux à la fois. L'illusion de l'équilibre et de la réciprocité est fondamentale. Les distances qui se dessinent entre le reste du monde et le duo d'hominines sont arborées fièrement, elles sont la bannière de leur nouveau territoire, l'Amourie.
Et comme toute illusion, même si elle s'enracine dans l'imaginaire des hominines, elle se matérialise par les conséquences bien réelles qu'elle induit sur l'existant. Si les amours réalicide, génocide et homininicide suintent l'odeur de cadavres et de sueurs paniques, dans le cas des amours singularicides il est question de la mort progressive des singularités, des individualités qui s'estompent et se dissolvent dans la relation amourienne. Parfois jusqu'à la mort. Mais peu importe, car pour elleux, "mourir d'amour est tellement autre chose que mourir"[21] ! L'autre soiÉprouver de l'amour est une chose irrépressible pour celleux qui s'en réclament. Cela semble au-dessus de leur volonté et il n'est pas prévu de le questionner car ce serait faire offense à la "pureté" du sentiment. Une insulte violente à l'encontre de la personne aimante. Comme avec la divinité, l'amour singularicide se porte sur l'hominine sans possibilité pour ellui de choisir d'en être ou non le réceptacle. Le consentement n'est pas indispensable. "Follement amoureux"[21], l'hominine-source ne tolère pas d'avoir à partager. Il n'est pas admissible que l'objet de son amour soit convoité par d'autres. Son propre amour prime toujours sur celui des autres hominines. La priorité se fait propriété. Le caractère unilatéral de l'acte d'aimer laisse peu de place aux avis et ressentis de l'hominine-réceptacle. Cellui-ci, selon la pratique courante du Singularicide, est aimé pour ce qu'ille semble être, sans considération pour ce qu'ille est. En effet, ne pouvant être réellement "à la place de", l'être amoureux se fonde sur l'illusion de connaître, parfois mieux qu'elle, la personne aimée. Quitte à devoir lui rappeler régulièrement. Peut-être un peu sèchement si nécessaire, mais "Qui aime bien, châtie bien"[21] proclame le dicton. L'hominine qui s'amourache est dans le doute permanent et tout est mis en œuvre pour se rassurer : l'être aimé est-ille toujours sensible à cet amour ? Les méthodes employées sont très diverses, des arts classiques aux arts martiaux. Sans qu'il soit bien clair s'il s'agit de prendre l'autre pour l'incarnation de la naïveté ou si nous sommes en présence de discours délirants, l'un des argumentaires souvent employé est une poésie absurde et un imaginaire de promesses intenables. De L'hymne à l'amour d'Édith Piaf à Ne me quitte pas[56] de Jacques Brel, en passant par Ma jolie de Jul[57] et Adolf mon amour[58] de Gogol Ier, les plus belles chansons d'amour sont un agglomérat de non-sens et d'exagérations. Entre les projets de décrocher la lune et les espérances d'amour qui survit à la mort, toutes se fondent sur des affirmations mensongères et des prétentions démesurées. Paradoxalement, pour sembler crédible, l'amour se doit de promettre des foutaises. "Je t'aimerais toujours"[21] est le b.a.-ba amourien. L'hominine qui proclame cela est au comble du bonheur. Cet amour est tout ce qui importe car les sensations qu'il procure sont plaisantes et flattent son égo. Pour l'être aimé, il est question de correspondre à l'image attendue et fantasmée. Ne pas le faire, c'est prendre le risque de mettre en péril les douces sensations que cela apporte à l'autre et de passer à côté de tous les bénéfices, pour soi, de cet amour. Si être aimé c'est plaire à l'autre, aimer c'est mettre en état de subordination. Telle est la dialectique de l'amour. Même si les amours impossibles sont un thème récurrent[59], il y a nécessité absolue pour l'hominine enamouré d'être entendu. Son bien-être dépend totalement de quelque chose qui lui est extérieur. Ille se construit ainsi. La charge émotionnelle et la responsabilité est énorme pour la personne aimantée. L'enjeu est crucial pour l'aimante. L'entre-soiL'antre soiAmouricide univérienNotes
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