Les Bateliers

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Bateliers (Гемиџии, transcrit Gemidžii, en macédonien) Groupe anarchiste actif en Macédoine, alors Roumélie ottomane, entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle après JC[1].

[En cours de rédaction]


Contexte

Organisation révolutionnaire intérieure macédo-andrinopolitaine

Anarchistes bulgaro-macédoniens

Influence russe

Les Bateliers

Banque ottomane d'Istanbul

Fin 1899, Svetoslav Merdjanov et Piotr Mandjoukov se rendent sous de fausses identités à Istanbul, chacun empruntant un itinéraire différent. Leur but est d'y mener une action violente, mais ils ne disposent que de peu de moyens. Les premiers fonds sont obtenus auprès de l'exarque Joseph I[2] à qui Merdjanov extorque un peu d'argent. En couverture, Merdjanov se prétend étudiant en droit, dont la santé fragile nécessite d'être à Istanbul, et Mandjoukov dit vouloir s'inscrire au lycée français de la ville. Ce dernier justifie de revenus en se faisant embaucher comme typographe dans l'unique imprimerie bulgare stanbouliote, tenue par Stoyanov Kaltchev et son fils Nantcho, tout deux sympathisants de la "cause macédonienne".

Comme tous les ans, afin d'assister à une cérémonie devant le supposé manteau de Mahomet[3], le sultan ottoman se déplace dans Istanbul à bord d'une calèche entre son palais et le lieu de la cérémonie. C'est cette occasion, le 14 janvier 1900, que Merdjanov et Mandjoukov choisissent pour intenter à la vie du sultan. Mais la foule et la rapidité à laquelle passe le cortège sultanesque ne permettent pas aux deux anarchistes de lancer leur bombe ou d'ouvrir le feu sans prendre le risque de faire des blessés innocents. Finalement, ils renoncent à cette action. Ayant eu vent de la présence de ce groupe d'anarchiste, l'ORIMA, qui désavoue les attentats comme mode d'action, envoie à Istanbul un de ses membres pour exécuter Merdjanov et Mandjoukov. Parvenus à déjouer cette tentative, sans tuer leur exécuteur, les anarchistes chargent Jordan Popjordanov l'un des leurs à Salonique de faire savoir directement à la direction de l'ORIMA que :

Si une seconde fois, vous tentez de tuer n'importe qui de nos camarades, nous vous réglerons votre compte à tous, car nous vous connaissons bien, et vous nous connaissez aussi !

Sans connaître la nature exacte de leurs projets, ni leurs identités réelles, les autorités ottomanes lancent une récompense de 10 000 lires pour la capture de S. Merdjanov et P. Mandjoukov.

Piotr Sokolov les rejoint à la fin du mois de janvier 1900. Il arrive sous sa vraie identité et fait valoir sa profession de peintre. Décidés à organiser un nouvel attentat, le trio anarchiste jette son dévolu sur la banque ottomane d'Istanbul[4] qu'ils veulent détruire à l'explosif, celle-là même que des arméniens avaient occupé en 1895[5]. Pour eux, la cible est doublement intéressante car, outre les bureaux de la banque, le bâtiment abrite la régie des tabacs dont les principaux capitaux sont français. Début mars 1900, une maison de trois étages est louée en face de la banque au nom de l'imprimeur, des stocks de papier et des caisses vides y sont entreposés. Dans cette maison, un puisard de 80 cm de large et 3,5 mètres de profondeur est la base de départ de leur projet de percement d'un tunnel de 14,5 mètres sous la rue pour rejoindre un coin du bâtiment bancaire et y déposer des charges explosives. Deux personnes - Zvetko Naoumov et Hadjiata - sont affectées à la surveillance de la maison pendant que deux équipes se relaient pour percer. Konstantin Kirkov et Mandjoukov forment une équipe, Sokolov et Merdjanov une autre. Le 10 mars Mandjoukov entame, seul, les trois premiers jours de travaux, armé d'un marteau, de burins, de bougies, d'allumettes et d'une boussole :

J'ai commencé par enlever des pierres de la maçonnerie en fixant, à ma gauche, au fond du puisard, la bougie ! Lorsque le trou atteignit les dimensions permettant de m'y introduire en rampant, je m'arrêtai. Mais l'insuffisance d'espace à l'endroit où je travaillais rendais très difficile l'arrachement des pierres ; et il était difficile plus encore de les retirer et de les arranger. Enfin, au prix de beaucoup d'efforts je réussis à disposer les pierres de telle manière qu'elles me servaient de marches pour monter et descendre dans le puisard.

Je ressentis une fatigue terrible. De plus, la flamme de la bougie diminuait peu à peu et s'éteignit. J'essayai de la rallumer, mais en vain : les allumettes ne prenaient pas. La respiration devint difficile, l'air me manquait ou, plutôt, il était surchargé en gaz carbonique. Je sentis que j'étouffais et j'eus un début d'évanouissement. Je me dépêchai de remonter avant de perdre connaissance, pour prendre du repos. Assis en haut des marches de l'escalier, je m'endormis. Lorsque je me réveillai, la journée allait se terminer...

Je sentis la faim et voulus dîner avant la tombée de la nuit. Mes mains étant très sales, je voulus me laver et c'est alors que je me rendis compte que j'avais oublié d'apporter de l'eau ! Et alors ! Que faire ? Après avoir hésité quelques instants, la faim me torturant, je décidai de me... laver en me servant de ma propre urine. Je sais que c'est dégoûtant, pas la peine de me le dire, mais... Enfin, j'essuyai mes mains avec le mouchoir, et je pris mon repas...[6]

Pendant une semaine, 10 heures par jour, les deux membres d'une équipe se chargent alternativement, par tranche d'une heure, du creusement et de l'évacuation des gravats pour l'un et de l'activation manuelle d'un grand soufflet de forgeron servant d'aération pour l'autre - afin d'éviter l'asphyxie qu'a connu Mandjoukov. Ils restent, sans sortir, une semaine entière à travailler, puis ils sont relayés par l'autre équipe. Une fois par semaine, le mercredi, le responsable du détachement militaire protégeant la banque fait une tournée d'inspection des lieux et maisons à proximité du bâtiment. Il inspecte quelques caisses de la maison louée et n'y trouve à chaque fois que des livres de langue russe ou des manuels législatifs. La nouvelle équipe profite de la relève militaire et de l'inspection hebdomadaire pour venir remplacer leurs compagnons. Kirkov quitte Istanbul fin mai et Pavel Chatev le remplace début juin. Arrive aussi Popjordanov en ce début d'été 1900. Épuisants, les travaux continuent, mais ne peuvent se faire qu'en journée car les coups de marteau risquent d'être entendus la nuit. Finalement, le percement est terminé le 7 août, presque 5 mois après le début des travaux.

Les 100 kg d'explosif doivent arriver de Batum - dans l'actuelle Géorgie - par l'entremise d'un arménien, Kosakov, mais la marchandise se fait saisir par le hasard d'un contrôle douanier. Kosakov est arrêté mais ne livre aucune information. En tant qu'étranger à l'empire ottoman, il est finalement expulsé. Et plus d'explosifs.

Dénoncés à la police ottomane par - selon Mandjoukov - l'exarque Joseph I qui n'a pas digéré d'avoir été extorqué, Merdjanov, Chatev, Sokolov et Mandjoukov sont arrêtés l'un après l'autre vers la mi-septembre 1900. Ils sont interrogés et emprisonnés pendant deux mois. La police n'identifie même pas Merdjanov et Mandjoukov pour qui elle a pourtant promis une récompense en cas de capture et les motifs de leurs arrestations n'ont pas de liens avec le percement du tunnel. Finalement, le sultan ordonne l'expulsion de trois d'entre eux vers la Bulgarie, seul Chatev - originaire de Kratovo en Roumélie ottomane - est assigné à résidence dans sa ville natale.

Dès leur retour en Bulgarie fin novembre, Merdjanov, Sokolov et Mandjoukov tentent de se fournir en explosif pour terminer leur opération. Les deux premiers se joignent en juillet 1901 à une attaque armée contre un train afin de le dévaliser dans la région d'Andrinople. Mais l'opération est un échec et la petite équipe doit se replier. Dans leur fuite, ils kidnappent le fils d'un dignitaire ottoman mais au moment de la remise de la rançon ils sont pris sous le feu des militaires de l'empire. Victime collatérale dans le langage polémologique, le "fils à papa" est tué lors des échanges de tirs. Sokolov est lui aussi tué. Merdjanov, gravement blessé, Khristo Iliev et deux arméniens Onik Torocian et Simerdjian sont arrêtés. Après quatre mois d'interrogatoires et de tortures, les quatre survivants sont condamnés à être pendu en place publique. La sentence est exécutée à Andrinople le 27 novembre 1901. Merdjanov tente une ultime déclaration mais, empêché, il place lui-même la corde autour de son cou et appelle une dernière fois à la révolution avant de mourir.

Salonique

Exils et déportations

Épilogue

Postérité

Notes

  1. Jésus aka Chris©
  2. Exarque Joseph I
  3. Reliques
  4. Banque ottomane d'Istanbul
  5. Occupation de 1895
  6. Mémoires de P. Mandjoukov