Agélaste
Agélaste ( en macédonien - en nissard) [En cours de rédaction]
SommaireÉtymologieComme beaucoup de mots de la langue française, les racines de agélaste sont à chercher du côté de la péninsule hellénique où les différents parlers "grecs" antiques fournissent des étymons à plusieurs futures langues d'Europe. Agélaste est constitué du préfixe privatif a-, de la racine grecque γελάω ("gelao") qui signifie rire, et du suffixe -aste. La première mention de agélaste remonte à François Rabelais dans Le quart livre des faicts et dicts heroiques du bon Pantagruel [1] en 1552. Il le note agelaʃte, avec l'ancienne graphie de la lettre s en vigueur à son époque. Dans son petit lexique en préambule, Rabelais indique qu'il l'emprunte à un texte de Cicéron, Sur la fin des bonnes et mauvaises choses [2] écrit en latin et publié en 45 avant JCⒸ [3] et à Pline l'Ancien dans le tome VII de son Histoire naturelle parue en 77 après. Tout deux précisent que le surnom Agelastos est donné à un certain Crassus qui n'aurait rigolé qu'une seule fois dans sa vie. Une information tirée des Satires de Lucilius [4] datées du IIème siècle avant JCⒸ. Un usage ancien de Agelastos en grec se retrouve dans les récits mythologiques. Au IVème siècle, le poète Callimaque surnomme ainsi le personnage de la mythologie gréco-romaine Pluton [5], le "dieu des Enfers". Un métier difficile dont il n'y a pas de quoi rire. Selon le Dictionnaire général de la langue française et vocabulaire universel des sciences, des arts et des métiers de 1842, l'Agélaste ou Agélastie est une "pierre célèbre dans l'Attique, sur laquelle se reposa [la divinité] Cérès fatiguée [et triste] de chercher sa fille Proserpine [enlevée par Pluton]." [6] Elle est parfois simplement nommée pierre agélaste. L'usage de agélaste n'est pas réservé au domaine mythologique. Des philosophes grecs du Vème siècle, Héraclite, Anaxagore et Aristoxène, sont déjà qualifiés d'agélastes [7]. Rabelais introduit agélaste dans la langue française du milieu du XVIème siècle sous forme d'un nom. La définition qu'il en donne est "Poinct ne rians, triſtes, faſcheux", il conserve donc le sens ancien de "Qui ne rit pas". Rabelais indique qu'il n'apprécie pas les agélastes car leurs calomnies l'ont fait hésiter à arrêter d'écrire. L'introduction de ce nouveau nom induit de multiples possibilités pour le décliner. Par extension, les agélastes sont les hominines qui font preuve d'une certaine agélastie. Cette dernière peut aussi revêtir un sens pathologique. Le mot agélaste est épicène : Il peut être utilisé au masculin ou au féminin grammatical sans que cela change sa forme. De par son orthographe il convient à une forme adjectivale. Une personne n'est pas uniquement un ou une agélaste, elle peut aussi être qualifiée d'agélaste. Un comportent agélaste ou d'agélaste est typiquement agélastique. Lorsqu'il ne s'agit pas d'un comportement net mais plutôt d'une tendance ou d'un état d'être, le néologisme agélasticité est conforme aux constructions classiques dans la langue française. Une forme verbale est envisageable. Agélaster ou se faire agélaster ? Voire agélastir. Ces possibilités offrent des nuances entre adopter pour soi-même une attitude agélastique, pour se défendre ou protester par exemple, et subir les manigances d'agélastes ou alors de se retrouver sans envie ou possibilité de rire. Agélastement introduit une dimension psychologique ou sociologique des comportements agélastiques et agélastiquement sous-entend un caractère tactique, une manière de faire spécifique. Quelle soit volontaire ou non. L'étude de l'ensemble des caractéristiques agélastes sont le domaine de l’agélastologie et de ses agélastologues ou agélastologistes qui cherchent les raisons de l'absence de rire et décrivent ce qui en découle pour les hominines. Leurs travaux et leurs argumentaires sont qualifiés de agélastologiques. Rien de tel que agélasterie pour donner une petite pointe ironique à cette absence. Ou d'agacement : "Encore une de tes agélasteries !" Un procédé peut être agélastérien. Comme tout phénomène, des hominines s'en emparent pour le défendre, le promouvoir ou le réformer. C'est le rôle que se donnent les agélastophiles avec leur agélastophilie. Inéluctablement, naissent des oppositions ou des peurs parmi les hominines qui se sentent plutôt agélastophobes. Milan Kundera, selon ses propres dires, affirme son agélastophobie. Afin d'éviter les errements phobiques, il est possible en gardant le même sens de proposer anagélatophile ou anagélaste grâce au privatif an-.
UsagesMais aucun de tous ces mots n'est présent dans les dictionnaires modernes de langue française. Même agélaste ou agelaste n'y sont pas mentionnés, hormis s'il s'agit de dictionnaires ornithologique car les agelastes sont deux espèces de pintades d'Afrique de l'ouest, les agelastes meleagrides ou pintade à poitrine blanche et les agelastes niger ou pintade noire [9]. Entre les XVII et XIXème siècles, plusieurs dictionnaires recensent ce mot [10]. La langue française moderne conserve la racine grecque de rire dans de rares mots de son vocabulaire et dans des domaines très spécialisés. La gélotophobie est la peur irrationnelle d'être victime de moqueries et de blagues. La gélothérapie qui propose le rire comme thérapie est l'application médicale de la gélotologie qui étudie les effets du rire. Les dérivés gélotologue et gélotologique sont aussi attestés. Dans le domaine médical, gélastique est utilisé pour qualifier une "crise épileptique comportant comme seul signe, ou signe principal, un éclat de rire singulier, immotivé" selon le Dictionnaire médical de l'Académie de Médecine. [11] Encore plus rare, l'adjectif gélasin·e. Selon le dictionnaire Littré il n'est employé que dans deux cas particuliers : Des dents gélasines sont celles qui se découvrent lors de rires et des fossettes gélasines sont celles qui se forment sur les joues des hominines qui rient. [12] Si ce n'est la "normalisation linguistique", il n'y a aucune raison pour que cela reste cantonné à ces deux seules expressions. En effet, des larmes de joie peuvent être gélasines. Une nervosité peut l'être avec le fameux rire nerveux. Ou un orgasme gélasin. Etc. Carmine Mangone rappelle qu'une amertume ou une tristesse peut aussi être gélasine.
Rabelais affirmait à tort que "le rire est le propre de l'Homme" dans Gargantua [14]. Depuis, de jeunes primates ont fait la démonstration de leur capacité à rire [15]. Si la plus ancienne preuve en images animées de la présence du rire chez les hominines préhistoriques date du documentaire La guerre du feu [16], la représentation fixe la plus ancienne d'hominines en train de rire, ou d'esquisser un sourire, date de plus de 17000 ans. Dans la grotte de la Marche, dans le département français de la Vienne, des gravures sur pierre sont "découvertes" au début du XXème siècle dont certaines montrent explicitement des visages gélasins [17]. Lorsque Rabelais se dit allergique aux agélastes, à celleux qui ne rient pas, il parle plus probablement des misogélastes [18], celleux qui détestent le rire. Les misogélastes refusent le rire. Jugé, au choix, trop décalé, offensant, inapproprié, dangereux, inutile, etc. Bref, pas assez sérieux. Il y a toute une nuance entre l'agélaste et son contraire l'hypergélaste [19]. Il est difficile de reprocher de ne pas rire à tout. Les aspects humoristiques de quelque chose sont relatifs à qui dit et qui entend. Ce qui faisait rire ne le fera pas nécessairement dans le futur, ce qui amuse des hominines attriste d'autres. La plus ancienne blague recensée date d'environ 4000 ans. Cet humour sumérien est très Pipi-Caca : "Il y a une chose qui n'est jamais arrivée depuis des temps immémoriaux : une jeune femme s'est retenue de péter sur les genoux de son mari." Les pets amusent déjà. Loin du jeu de mot "Naître esclave de tout. N’être esclave de rien" supposément retrouvé lors de fouilles archéologiques protivophiles sur un site sumérien[20] Rédigé en grec ancien dans le courant du IIIème siècle avant JC, le Philogelos — l'ami du rire — est le premier recueil d'histoires drôles connu. Il en contient 265. Les cibles sont, entre autres, les charlatans, les eunuques et les hominines femelles, les personnes ayant mauvaise haleine et les intellectuels. Ces derniers sont moqués pour leurs connaissances livresques et leur ultracrépidarianisme — l'art de donner son avis sur des sujets que l'on ne connaît pas. L'une des blagues du Philogelos met en scène un intellectuel qui exerce la médecine. Une personne vient le voir et lui dit : "Docteur, quand je me lève le matin, pendant une demi-heure je vois tout sombre, et ce n'est qu'après que j'y vois clair". Le médecin lui répond : "Tu n'as qu'à te réveiller une demi-heure plus tard". La prétention intellectuelle est raillée. Quelques histoires drôles romaines sont aussi répertoriées. En Europe de l'ouest, la plus ancienne trace écrite de blagues est le Codex d'Exeter, un recueil poétique rédigé en vieil-anglais à la fin du Xème siècle. Presque une certaine d'énigmes et devinettes. Certaines sont toujours actuelles et jouent déjà sur des ressorts sexués ambigus pour créer l'effet comique. "Elle est magnifiquement suspendue à la cuisse de l'homme, sous le manteau du maître. Devant, il y a un trou. Elle est rigide et dure ; elle a une bonne place. Lorsque le jeune homme soulève son propre vêtement par-dessus son genou, il souhaite visiter avec la tête de ce qui pend le trou familier qu'il a souvent rempli de sa même longueur." Réponse : Une clé. [21] Alors qu'évidemment l'idée est de faire penser au pénis des hominines mâles. L'adaptation moderne la plus appropriée est : "Qu'est-ce qui pend sur la cuisse d'un homme et aime à pénétrer dans un trou dans lequel il a l'habitude de pénétrer ?" Contrairement aux évidences, le terme de humour est d'origine anglaise. Un dérivé lointain du français humeur qui, au siècle, désigne les liquides et fluides du corps des hominines grâce auxquels la médecine de cette époque pense pouvoir expliquer leurs états de santé. Être de bonne humeur c'est être en bonne santé. Humeur a la même étymologie que humide et que humour, ce que valide l'expression "Rire à se pisser dessus". Depuis l'apparition de agélaste dans la langue française, peu d'auteurs semblent l'avoir utilisé.
MésusagesNotes
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