Dodeldirer : Différence entre versions
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<blockquote>''Un disciple vint un jour trouver Makaire l’Ancien. "Makaire, que dois-je faire pour sauver mon âme ? Va au cimetière, dit Makaire, et insulte les morts." Le disciple va au cimetière, insulte les morts, revient trouver Makaire. "Qu’ont dit les morts ?" demande Makaire. "Rien", répond le disciple. "Retourne au cimetière et va bénir les morts", dit Makaire. Le disciple retourne au cimetière, bénit les morts, revient trouver Makaire. "Qu’ont dit les morts ?", demande Makaire. "Rien", répond le disciple. "Sois comme les morts, dit Makaire. Ne juge personne et apprends à te taire."''<ref>Sérapion, ''Vie copte de Makaire l’Ancien''. Cité à l'entrée "réponse à tout" dans F. Merdjanov, ''Analectes de rien'', 2017</ref></blockquote> | <blockquote>''Un disciple vint un jour trouver Makaire l’Ancien. "Makaire, que dois-je faire pour sauver mon âme ? Va au cimetière, dit Makaire, et insulte les morts." Le disciple va au cimetière, insulte les morts, revient trouver Makaire. "Qu’ont dit les morts ?" demande Makaire. "Rien", répond le disciple. "Retourne au cimetière et va bénir les morts", dit Makaire. Le disciple retourne au cimetière, bénit les morts, revient trouver Makaire. "Qu’ont dit les morts ?", demande Makaire. "Rien", répond le disciple. "Sois comme les morts, dit Makaire. Ne juge personne et apprends à te taire."''<ref>Sérapion, ''Vie copte de Makaire l’Ancien''. Cité à l'entrée "réponse à tout" dans F. Merdjanov, ''Analectes de rien'', 2017</ref></blockquote> | ||
− | Remonter plus loin dans le temps devient plus problématique. D'où vient cette racine latine ? Les linguistes divergent sur les possibilités et les hypothèses à retenir. L'absence de toute source écrite les contraint à tenter de reconstruire des racines, voire des langues, en se basant sur des processus phonologiques. Ainsi, illes inventent des langues du passé lointain. De fait, les biais idéologiques ont une grande place dans la mise en place de ces recherches linguistiques, comme le montre très bien les débats autour des études indo-européennes<ref>Jean-Paul Demoule</ref>. Ces dernières établissent des schémas linguistiques qui supposent l'existence d'une source unique et ancienne, une proto-langue dont sont issues toutes les langues actuelles en Europe, et qui à ses origines dans le nord du sous-continent indien. Des schémas simples, voire simplistes ou mécanistes, qui réifient les processus linguistiques au détriment des variabilités, des innovations et des emprunts de proximité. Pour ce faire, des listes de racines indo-européennes sont établies. Généralement, l'étymologie proposée est précédée d'une astérisque (*) pour marquer le caractère reconstitué. Ainsi, le ''unda'' latin provient d'un proto-latin ''*udor'' que l'on retrouve dans l'ombrien ''utur'', "eau". À rapprocher du grec ancien ''ὕδωρ'' (prononcer "idor"), que l'on retrouve sous la forme ''hydro'' en français et issu de la racine indo-européenne ''*wódr̥''. Cette dernière est présente dans les langues germaniques, comme par exemple, l'anglais ''water'', ou dans le proto-slave ''*voda'' qui forme ''вода'', l'eau en [[macédonien]], ou la fameuse ''vodka'', l'eau-de-vie. Selon les études indo-européennes, ''*wódr̥'' vient du proto-indo-européen ''*ud-né-s'' qui est à relier avec le sanskrit उदन् (prononcer "udan"), "eau" ou "vague". | + | Remonter plus loin dans le temps devient plus problématique. D'où vient cette racine latine ? Les linguistes divergent sur les possibilités et les hypothèses à retenir. L'absence de toute source écrite les contraint à tenter de reconstruire des racines, voire des langues, en se basant sur des processus phonologiques. Ainsi, illes inventent des langues du passé lointain. De fait, les biais idéologiques ont une grande place dans la mise en place de ces recherches linguistiques, comme le montre très bien les débats autour des études indo-européennes<ref>Jean-Paul Demoule</ref>. Ces dernières établissent des schémas linguistiques qui supposent l'existence d'une source unique et ancienne, une proto-langue dont sont issues toutes les langues actuelles en Europe, et qui à ses origines dans le nord du sous-continent indien. Des schémas simples, voire simplistes ou mécanistes, qui réifient les processus linguistiques au détriment des variabilités, des innovations et des emprunts de proximité. Pour ce faire, des listes de racines indo-européennes sont établies. Généralement, l'étymologie proposée est précédée d'une astérisque (*) pour marquer le caractère reconstitué. Ainsi, le ''unda'' latin provient d'un proto-latin ''*udor'' que l'on retrouve dans l'ombrien ''utur'', "eau". À rapprocher du grec ancien ''ὕδωρ'' (prononcer "idor"), que l'on retrouve sous la forme ''hydro'' en français et issu de la racine indo-européenne ''*wódr̥''. Cette dernière est présente dans les langues germaniques, comme par exemple, l'anglais ''water'', ou dans le proto-slave ''*voda'' qui forme ''вода'', l'eau en [[macédonien]], ou la fameuse ''vodka'', l'eau-de-vie. Selon les études indo-européennes, ''*wódr̥'' vient du proto-indo-européen ''*ud-né-s'' qui est à relier avec le sanskrit उदन् (prononcer "udan"), "eau" ou "vague". Entre les plateaux iraniens et le sous-continent indien, plus de dix siècles avant JC<sup>Ⓒ</sup>, le sanskrit <ref>sanskrit</ref> a joué le même rôle que le latin en Europe des siècles plus tard. Il a profondément marqué les langues qui naissent et se différencient dans sa zone d'influence. Des dérivés sont présent dans de multiples langues avec le sens de "eau". Du sud de l'Inde avec le télougou ఉదకము (prononcer "udakamu"), en passant par les plateaux afghans et le gandhari 𐨀𐨂𐨡𐨒 (prononcer "udaga") ou اودُر (prononcer "odur") dans les confins cachemiriens. Pour ce qui est de l'origine de la racine sanskrite, la question ne peut être abordée sans verser dans l'illusion. |
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+ | <blockquote>''Se faire des illusions est un problème dans la mesure où, justement, il est question d’une illusion''<ref>Devise d'ouverture du film ''[[Los Porfiados]]'', réalisé en 2002 par l'argentin Mariano Torres Manzur</ref></blockquote> | ||
=== ''direr'' === | === ''direr'' === |
Version du 23 septembre 2022 à 18:42
Dodeldirer ( en macédonien - en nissard) Verbe de la langue française pour le cri du coq de bruyère, le Grand Tétras.
ÉtymologiesTrès peu usité, le mot dodeldirer est d'une étymologie incertaine. Il se compose de dodel et de ce qui semble être une forme verbale du verbe dire. dodelLes seuls mots de la langue française actuelle à se baser sur l'étymon dodel sont dodeliner[1], dodelinant et dodelinement. Tous trois exprimant un léger balancement. Même s'il est possible d'en parler pour tout le corps, dodeliner est souvent utilisé dans l'expression "dodeliner de la tête". Le radical dod se retrouve dans dodiner qui a le sens de "balancer" ou de "bercer"[2]. Selon moult étymologistes, dod est d'origine onomatopéique et reproduit le bruit d'un balancement ! Idem pour dad et dand qui constituent par exemple les mots dadais et dandiner. L'un désigne l'hominine se balançant légèrement dans une attitude désinvolte, l'autre est une manière de marcher en balançant les hanches. Un dandin est autant une cloche qu'une autre forme de dadais. Outre le français officiel des dictionnaires et de l'Académie, les pratiques linguistiques dites "régionales" conservent de nombreux mots basés sur ces différentes racines et qui évoquent un balancement ou un mouvement doux[3]. Le mot du vocabulaire enfantin dodo est peut-être lié à la racine dod, en rapport à l'endormissement de l'hominine enfant par bercement[4]. Au XIVème siècle après JCⒸ[5], dod évoque, au sens figuré, le fait d'être choyé. Ainsi (se) dodiner c'est prendre soin de soi ou de l'autre, et être dodu une marque de bonne vie. Les formes utilisées dans les textes moyenâgeux sont déjà des déclinaisons du mouvement de balancier. Une dode est une gifle, un soufflet. Et dodiminer signifie "caresser". La plus ancienne mention connue de dodel est datée de la seconde moitié du XIIIème siècle dans le texte Hugo de Lincolnia[6]. Rédigé en anglo-normand, il relate les persécutions en 1255 contre des moïsiens[7] de la ville anglaise de Lincoln, injustement accusés du meurtre rituel [8] de Hugues, un très jeune hominine christien. Le sens exact du mot n'est pas aisé à déterminer. Il y a une possible confusion entre les verbes ouïr, "entendre", et œiller, "regarder", dans "Ore oez le grant dodel del enfant". Faut-il entendre ou voir le grand dodel que fait l'enfant après sa crucifixion ? Dans le Dictionnaire de l'ancienne langue française et de tous ses dialectes du 9e au 15e siècle, Frédéric Godefroy propose de traduire dodel par plainte ou cri, tout en émettant des réserves sur cette traduction[9]. Hugues est-il en train de gémir doucement ou de hurler de douleur d'être crucifié vivant ? Ou plutôt gesticule-t-il dans tous les sens ou tremble-t-il doucement ? Durant ces siècles, les variations de prononciation et de notation sont grandes dans l'espace linguistique de la moitié nord de l'actuelle France. La racine dod côtoie dad, dod, dand ou dond. Forme que l'on retrouve dans dondon, utilisé dans l'expression "être une dondon" pour parler d'une hominine femelle qui a de l'embonpoint, ou dans l'adjectif dondé pour qualifier une chose grasse ou replète. Ce dernier est aujourd'hui inusité. Hormis les quelques sens figurés, la racine dod semble se rapporter systématiquement à un mouvement. Le nom dodel est-il construit à partir de la racine à laquelle est ajouté le suffixe -el qui, en français, indique ce qui est relatif à quelque-chose ? Comme par exemple, individuel, existentiel ou excrémentiel. Au côté de ce qui sera par la suite appelé "ancien français"[10], de nombreuses autres pratiques linguistiques existent alors dans les régions du royaume de France. L'invasion de l'Angleterre par Guillaume de Normandie dans la seconde moitié du XIème siècle bouleverse les pratiques linguistiques sur l'île. Les hominines qui y vivent parlent des langues celtiques ou germaniques, et la nouvelle aristocratie qui s'installe pratique un "français" de Normandie. L'anglo-normand prend forme. Au fil des siècles, il se mêle au "vieil anglais"[11] pour constituer le "moyen anglais" entre le XIIème et la fin du XVème siècle. Le vocabulaire d'origine anglo-normande ou française représente un énorme pourcentage de la langue anglaise qui se standardise[12]. Le mélange entre l'anglo-normand et le vieil-anglais alimente la langue de racines multiples. Des mots se forgent à partir de dod, dad, dand et dond. Le verbe dandle signifie "se dandiner", "trépigner sur place". Le moyen-anglais daderen, signifiant "secouer", devient dadder puis dodder au début du XVIIème siècle, en conservant le même sens. Dodel est mentionné dans les dictionnaires de moyen-anglais et l'anglais du milieu du XVIIème utilise doddle pour "secouer la tête"[13]. Le scots[14], une langue germanique du sud de l’Écosse, proche de l'anglais mais moins influencée par l'anglo-normand, emploie doodle dans le sens de "bercer"[15]. Une variante de doddle se retrouve dans l'expression anglaise "Cock-a-doodle-doo !" qui se traduit en français par "Cocorico !", le chant du coq. Dans cette langue, le coq fermier coquerique[16], coquericote ou coqueline et le coq de bruyère dodeldire, alors qu'en anglais, "cock-a-doodle-doo" s'applique aux deux espèces. Elle est attestée dès la seconde moitié du XVIème siècle. Sous l'influence de la langue anglaise, le gaélique d'Irlande[17] a repris cette expression, notée cuc-a-dudal-du. Si cocorico est souvent qualifié d'onomatopée, l'expression anglaise semble être composée de mots distincts. Elle peut se traduire par "coq-fait-un-dodel" ! Le cocorico reproduit très approximativement la sonorité du cri du coq et le "cock-a-doodle-doo" décrit une gestuelle particulière. L'observation du coq de bruyère montre en effet qu'il secoue la tête de manière singulière lorsqu'il pousse son cri [18], là où le coq fermier se contente de tendre le cou pour chanter à gorge déployée. Comme pour cocorico, il est toujours possible d'écouter en boucle des enregistrements d'un chant jusqu'à se persuader qu'il produit un sonorité proche de cock-a-doodle-doo ! Pourtant, cette expression ne semble pas être une onomatopée. La plupart des langues germaniques possèdent des variantes de dodel, avec des sens figurés autour du mouvement, du balancement. Le moyen-allemand [19] utilise dändeln puis tändeln pour "calîner". Le moyen-néerlandais [20] emploie dantinnen pour "se jouer de quelqu'un" ou danten pour "bavardages". Ces significations liées au mensonge se retrouvent dans différentes variations autour de dod et de dand dans l'ancien français et l'anglo-normand. Dodin signifie "trompeur" et un dando est un "mari trompé". Les pratiques linguistiques régionales en France conservent, par exemple, endodiner ou endodeliner pour "se jouer de quelqu'un". Le glissement entre le doux balancement qui berce et le mensonge est présent dans l'expression "Se faire endormir". À deux doigts (ou deux lettres) de se faire embobiner ! Dans la moitié sud de la France et dans l'ensemble des langues latines d'Europe, la racine unda est présente sous différentes formes avec le sens de "vague", "onde". Du roumain undă au corse onda en passant par le portugais onda ou le dalmate jonda. Dans certaines langues avec le sens de mer ou de eau. Le français actuel conserve dans ce sens des mots tel que ondée [21], ondin, ondine [22] et ondinisme [23]. L'origine de cette racine est à chercher dans le latin. Entre l'essor de l'empire romain et son effondrement, le latin se diffuse dans toutes les régions de l'empire. Il s'entremêle aux pratiques linguistiques des régions conquises. Il rencontre des langues dites celtiques, germaniques ou slaves. Ce "latin populaire" n'a pas de forme écrite précise, ni de prononciation unique généralisée. Les mélanges ne suivent pas des processus identiques, et donnent lieu à partir du IXème siècle à l'apparition de langues littéraires qui supplantent la pratique du latin. Les sonorités se sont transformées dans ce que les linguistes appellent nasalisation, palatalisation, labialisation, etc. En bref, les mutations entre, par exemple, les sons "ch" et "ke", entre "t" et "d", entre "u" et "ou", entre "on" et "en". Tout comme le français dodeliner, l'italien utilise dondolare [24] dans un sens identique. Les étymologistes de l'italien proposent la plupart du temps une construction basée sur le latin deundulare, de unda qui signifie "eau". De-undulare renvoie au fait de "bouger comme de l'eau", onduler en français.
Remonter plus loin dans le temps devient plus problématique. D'où vient cette racine latine ? Les linguistes divergent sur les possibilités et les hypothèses à retenir. L'absence de toute source écrite les contraint à tenter de reconstruire des racines, voire des langues, en se basant sur des processus phonologiques. Ainsi, illes inventent des langues du passé lointain. De fait, les biais idéologiques ont une grande place dans la mise en place de ces recherches linguistiques, comme le montre très bien les débats autour des études indo-européennes[26]. Ces dernières établissent des schémas linguistiques qui supposent l'existence d'une source unique et ancienne, une proto-langue dont sont issues toutes les langues actuelles en Europe, et qui à ses origines dans le nord du sous-continent indien. Des schémas simples, voire simplistes ou mécanistes, qui réifient les processus linguistiques au détriment des variabilités, des innovations et des emprunts de proximité. Pour ce faire, des listes de racines indo-européennes sont établies. Généralement, l'étymologie proposée est précédée d'une astérisque (*) pour marquer le caractère reconstitué. Ainsi, le unda latin provient d'un proto-latin *udor que l'on retrouve dans l'ombrien utur, "eau". À rapprocher du grec ancien ὕδωρ (prononcer "idor"), que l'on retrouve sous la forme hydro en français et issu de la racine indo-européenne *wódr̥. Cette dernière est présente dans les langues germaniques, comme par exemple, l'anglais water, ou dans le proto-slave *voda qui forme вода, l'eau en macédonien, ou la fameuse vodka, l'eau-de-vie. Selon les études indo-européennes, *wódr̥ vient du proto-indo-européen *ud-né-s qui est à relier avec le sanskrit उदन् (prononcer "udan"), "eau" ou "vague". Entre les plateaux iraniens et le sous-continent indien, plus de dix siècles avant JCⒸ, le sanskrit [27] a joué le même rôle que le latin en Europe des siècles plus tard. Il a profondément marqué les langues qui naissent et se différencient dans sa zone d'influence. Des dérivés sont présent dans de multiples langues avec le sens de "eau". Du sud de l'Inde avec le télougou ఉదకము (prononcer "udakamu"), en passant par les plateaux afghans et le gandhari 𐨀𐨂𐨡𐨒 (prononcer "udaga") ou اودُر (prononcer "odur") dans les confins cachemiriens. Pour ce qui est de l'origine de la racine sanskrite, la question ne peut être abordée sans verser dans l'illusion.
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