Zanzibar

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Zanzibar.

[En cours de rédaction]


Triangulation protivophile

Archipel de Zanzibar

Zanzibar est un archipel constitué de deux îles principales, Pemba et Unguja, et de plus d'une vingtaine d'îlots chacune. Il est situé à environ 6300 km de Nice et 5460 km de la Macédoine. Seules Pemba, Unguja et quelques îlots sont peuplés d'hominines. De nos jours, la population est de plus de 400000 sur la première et de plus de 700000 sur la seconde pour une superficie respective de 980 km2 et 1666 km2. Pemba est 50 km au nord-est d'Unguja. La plus grosse agglomération urbaine d'hominines est Zanzibar City[1] avec ses 200000 hominines sur l'île d'Unguja et Chake-Chake sur Pemba. L'archipel étant lui-même à une cinquantaine de km à l'est de la côte la plus proche dont il est séparé par un canal, infime partie de l'océan Indien. Du point de vue géologique, l'archipel est dit "continental". Ainsi il est situé sur la plaque tectonique africaine. Celle-ci se déplace vers le nord-est de 2,15 cm par an. Ce mouvement est fondamental pour la constitution géologique du grand ensemble montagneux, appelé ceinture alpine, qui s'étend des côtes du Maroc à l'Himalaya, en passant par l'Atlas, la côte ibérique, les Pyrénées, les Alpes et les Apennins, les Balkans, les Carpates, les montagnes d'Asie mineure, le Caucase, les plateaux iraniens, l'Hindou Kouch puis l'Himalaya, pour finir tout le long de l'Indonésie. Cette ceinture est la conséquence de la dérive des continents et de la rencontre entamée il y a 65 millions d'années entre les plaques tectoniques eurasiatiques, africaines, arabiques et indiennes qui, pour les trois dernières, remontent à des vitesses différentes[2]. De cette tectonique de la plaque africaine naissent les Balkans qui traversent la Macédoine et les secousses sismiques qui font trembler la région de Nice. L'archipel de Zanzibar est à l'est de cette plaque africaine, mouillé par l'océan Indien, au nord des côtes de l’État tanzanien et à l'extrême sud de l’État kényan. Unguja - parfois appelée "Île de Zanzibar" parce qu'elle abrite Zanzibar City - est à 50 km au nord de Dar-es-Salam[3], principale ville et capitale économique de l’État tanzanien qui exerce sa souveraineté - internationalement reconnue - sur l'ensemble de l'archipel depuis 1964.

Zanguebarien

Étymologiquement basé sur le persan zang, "Noir", l'expression persane زنگبار Zangi-bar signifie la "Côte des Noirs". La langue française a forgé le terme de Zanguebar utilisé dans divers récits et études[4]. Pour les premiers marins arabes et persans qui cartographient la région elle désigne les côtes du nord de l'Afrique orientale et les îles qui les parsèment, entre Madagascar et la pointe de la Corne de l'Afrique, de l'archipel comorien aux rivages soqotriens. Ils nomment "mer de Zandj" les eaux qui longent cette côte. Le commerce d'épices et d'esclaves est florissant dans la région : à partir du IXème siècle après JC[5] les marchands arabes et perses exportent des hominines, razziés dans l'arrière-pays, et de nombreux autres produits tel que le gingembre - dont le nom est une déformation de "zangibar" -, des bouts d'animaux morts (fourrures et ivoire) ou de l'or. Par extension, le terme de Zandj désigne les milliers esclaves utilisés en Mésopotamie dans le but d'assécher les marais et développer la culture de la canne à sucre[6]. La mer des Zandj est une ouverture vers le commerce maritime avec le sous-continent indien et la Chine, et la côte est une source inépuisable de diverses matières premières. Des marchands arabes et perses, avec leurs familles, s'installent dans quelques villes existantes, ou créent des comptoirs commerciaux : par simple appât du gain, parfois pour fuir les dissensions et la répression dans les luttes internes à la nouvelle religion des mahométiens[7].

Côte du Zanguebar - 1682
Les rapports entre ces hominines venus des confins arabiques et perses et les autochtones sont compliqués car pour le commerce, il est nécessaire d'effectuer des alliances avec certains pour réduire d'autres en esclavage. Une hiérarchisation sociale se met doucement en place. En haut de la pyramide, les familles de commerçants arabo-perses, puis l'ensemble des hominines pouvant servir à la bonne marche du commerce, et le reste qu'il est toujours bon de pouvoir capturer et vendre. Vers le Moyen-Orient ou l'Asie. Malgré les mélanges biologiques et culturels entre ces hominines les différentiations sociales se sont construites dans une mythologie des origines, mais grâce à ce brassage a émergé l'espace swahili. Venant du terme arabe sahel, "côte", swahili désigne une langue du même nom et un ensemble linguistico-culturel qui se différence petit à petit et opte pour les croyances des mahométiens, et plus globalement l'ensemble politico-mercantile dont la traite des esclaves est le fonds de commerce principal. Les comptoirs swahilis et leur commerce sont convoités par le sultanat d'Oman qui s'implante doucement le long des côtes[8]. Les différents comptoirs ne constituent pas une entité politique et administrative unique, ils sont des sortes de cités-États éparses dont le rayonnement est fluctuant. En parallèle de ces installations commerciales sur leurs territoires, les îles de l'archipel de Zanzibar sont progressivement explorées par des hominines qui s'y installent durablement. Les premières constructions en pierre datent du XIIIème siècle.

Zanzibar se structure en sultanat indépendant, Pemba et Unguja sont des places importantes du commerce mondial entre le XIème et le XIXème siècle. L'autorité politique du sultanat s'exerce aussi sur les quelques portions de côtes qui échappent au contrôle des comptoirs-États de cette longue côte de la mer de Zandj. La puissance économique et l'intérêt stratégique de l'archipel pour le commerce entre l'Afrique, la Méditerranée et l'Asie sont objets de convoitise pour les omanais, les portugais et les britanniques dès la fin du XVème siècle. Les premiers, de plus en plus présents le long de la côte des Zandj, sont pris de cours par les seconds qui, d'une part, occupent l'archipel et destituent le sultan de Zanzibar, et d'autre part, prennent le contrôle de quelques grands comptoirs côtiers, tel Mombasa. Les britanniques s'octroient quelques places commerciales dans le sud du Zanguebar côtier pour sécuriser leur "Route des Indes". Renforcé par sa conquête du sultanat de Mascate, le sultanat d'Oman - dorénavant de Mascate et Oman - parvient à la fin du XVIIème siècle à chasser les portugais et à prendre le contrôle de l'archipel. L'ancien sultanat zanguebarien - l'archipel et quelques territoires côtiers - devient partie intégrante de celui de Mascate et Oman. La religion officielle du sultanat de Mascate et Oman est une forme minoritaire de croyance des mahométiens, appelée "kharidjisme ibadite"[9] et étiquetée "modérée et ouverte", qui est très peu interventionniste - au regard des autres - dans la vie quotidienne de ces mêmes autres.

Tout au long du XVIIIème jusqu'au début du XIXème siècle, l'empire de Mascate et Oman ne cesse de consolider ses positions dans la région. Son territoire s'étend alors du Balouchistan (dans l'actuel Pakistan) à Madagascar, et de nombreux comptoirs ou cités commerçantes, sont prises aux portugais. Les seuls concurrents sérieux à Mascate et Oman dans le contrôle des voies maritimes commerciales restent les britanniques. La puissance économique et politique de l'archipel de Zanzibar est telle que le sultan mascato-omanais renomme son empire Sultanat d'Oman et Zanzibar et fait transférer la capitale à Zanzibar City. L'abolition de l'esclavage par les principaux pays d'Europe et les États-Unis d'Amérique entrave la bonne marche de ce commerce et contraint l'empire à utiliser la main-d'œuvre en surplus - les esclaves devenus difficilement vendables - dans de nouvelles activités lucratives. La culture du giroflier s'intensifie, à destination du marché mondial, et emploie jusqu'à 20000 hominines esclavagisés[10]. La production massive d'épices divers sur Zanzibar entraîne rapidement une chute des prix. L'abolition de la traite esclavagiste et les entraves faites à ce commerce par les pays abolitionnistes entament la puissance économique du sultanat d'Oman et Zanzibar. Encouragées par les britanniques qui veulent affaiblir Oman, des dissensions apparaissent entre le sultan d'Oman et des prétendants au sultanat de Zanzibar. Dans les querelles de successions, les britanniques soutiennent, avec la promesse d'interdire la traite négrière, l'indépendance du Sultanat de Zanzibar en 1861. Après une visite en Europe en 1875, année de naissance de Jeanne Calment, le nouveau sultan de Zanzibar s'entoure de conseillers britanniques pour réformer l'économie et asseoir son pouvoir politique et militaire. La menace des prétentions allemandes dans la région finit par convaincre le pouvoir zanzibarien de se mettre sous la protection des britanniques. Les empires européens ne cessent de signer entre eux des accords et des traités où ils s'attribuent et se partagent des zones du globe terrestre qu'ils convoitent. Celui de Berlin en 1886 donne à l'Allemagne les côtes de la future Tanzanie et l'archipel de Zanzibar, à la France les Comores et Madagascar, au Portugal la pointe nord du futur Mozambique et aux britanniques les côtes du futur Kenya. Il n'est en rien dans la rencontre furtive entre la jeune Jeanne Calment, alors âgée de 13 ans, et le peintre Vincent Van Gogh venu acheter des toiles vierges au père de l'adolescente, lors de son passage à Arles durant l'année 1888. Le traité Heligoland-Zanzibar que signent allemands et britanniques en 1890 stipule que l'archipel passe sous domination britannique en échange d'une île située dans la mer au nord de l'Allemagne, Heligoland. A cette date le sultanat devient "officiellement" un protectorat incorporé à l'empire colonial britannique.

Zanzibarien

Politiquement, le protectorat de Zanzibar s'appuie sur un successeur du sultan désigné par les autorités britanniques. Mais d'autres aspirent aussi à devenir sultan et mettent en avant leur légitimité. En 1896, un prétendant au titre vacant depuis le décès du sultan rejette l'autorité britannique et tente un coup de force pour s'installer au pouvoir et s'émanciper des britanniques. Le sultan "de ses rêves" mobilise des hominines en armes, civils, esclaves et militaires, pour faire face à la puissance militaire britannique. Seulement quelques mois après le mariage de Jeanne Calment, le 27 août 1896 s'enclenche le conflit britanico-zanzibarien. A 9H02 les bateaux de guerre britanniques déversent leurs bombes sur le palais à Zanzinbar City et tuent un grand nombre de zanzibariens armés. Trente-huit minutes plus tard, après des centaines de bombes jetées, les tirs s'arrêtent lorsque le prétendant sultan se réfugie auprès des autorités allemandes. Ainsi prend fin le conflit britanico-zanzibarien. Plus de 500 morts côté zanzibarien et un seul blessé chez les britanniques. Le palais est détruit. Le 29, la reddition est signée et le prétendant laisse la place au préféré des britanniques. Selon les études de polémologie l'affrontement britanico-zanzibarien est le conflit le plus court de l'histoire répertoriée des hominines.

En 1905, paraît en France le livre Mémoires d'une princesse arabe[11] d'Emily Ruete. Publié en allemand en 1886, ce livre est l'autobiographie de la princesse d'Oman et Zanzibar. Née Sayyida Salme en 1844, fille du sultan et d'une concubine esclave d'origine caucasienne, et sœur de ses deux successeurs de fils qui partagent l'empire et le divisent en deux, elle fuit Zanzibar City en 1866 pour échapper à l’opprobre que suscitent sa relation amoureuse avec un allemand et l'enfant en gestation. Elle se marie en 1867 avec Rudolph Ruete et prend le nom christien de Emily. Le couple et leur enfant s'installent en Allemagne. Rudolph meurt accidentellement trois ans plus tard, laissant Emily veuve avec trois enfants, sans droit de succession en Allemagne et privée de son héritage par son frère le sultan de Zanzibar. Celui-ci refuse même de la recevoir lors de son passage à Londres en 1875. Elle tente un retour à Zanzibar en 1885 mais elle est contrainte par le sultan à repartir en Allemagne. La publication en 1886 de ses mémoires est un succès de librairie, traduit en plusieurs langues dans les années suivantes. Elle y relate la vie de la cour du sultan, ses dessous, et les mœurs de Zanzibar, vus par les yeux d'une jeunesse dorée, d'une personne à cheval entre les univers européens et zanzibariens. La traduction en France en 1905 est l'occasion pour Jeanne Calment de découvrir l'existence de Zanzibar. Elle a du temps pour lire car, mariée depuis bientôt dix ans avec son cousin Fernand Calment, un riche marchand d'Arles, elle mène une vie de femme aisée profitant de son temps libre pour se livrer à ses loisirs. Après quelques années au Proche-orient, Emily s'installe de nouveau en Allemagne en 1914 et - contrairement à Jeanne Calment - meurt en 1924.

La Première guerre mondiale rebat les cartes de la colonisation. Perdante de cette guerre, l'Allemagne doit céder l'ensemble de son empire colonial qui est redistribué. L'Afrique Orientale Allemande est divisée entre le Urundi-Rwanda qui devient possession belge et le Tanganyika britannique. Celui-ci comprend les territoires entre les grands lacs d'Urundi-Rwanda et la côte de Zandj. L'archipel de Zanzibar reste protectorat britannique. Comme souvent dans son empire, les autorités britanniques ne mettent pas en place une colonie de peuplement mais administrent la politique et l'économie locales en co-optant des dynasties locales plutôt que d'autres. La première moitié du XXème siècle est remuante dans l'archipel de Zanzibar. La Seconde guerre mondiale perturbe l'approvisionnement de l'archipel et attriste Jeanne Calment qui perd son mari en 1942. Les britanniques sont confrontés aux contestations populaires des conditions de vie dans le protectorat, aux "émeutes raciales" et aux luttes entre le partis politiques locaux émergeant. Ceux-ci se calquent sur les hiérarchies sociales déjà existantes, l'un dit représenter les chirazis, l'autre les arabes et un autre les afros. Les discours mélangent préservation des acquis pour l'élite de Zanzibar, revendications sociales et projets d'indépendance. Le panel politique va des conservateurs aux marxistes-léninistes. Des émeutes violentes ravagent parfois les rues de Zanzibar, certaines visent des personnes identifiées indiennes ou arabes, accusées d'appartenir ou de soutenir les classes dominantes. Les luttes entre les partis politiques zanzibariens sont parfois ponctuées d'assassinats ciblés et les élections contestées. Pour tenter de calmer la situation et se désengager, les britanniques donnent l'indépendance de l'archipel de Zanzibar en décembre 1963. Dans quelques mois Jeanne Calment fête son 89ème anniversaire, elle vient de perdre son petit-fils et reste dorénavant sans héritiers.

Mercurien

Notes

  1. Zanzibar City
  2. La plaque africaine se déplace vers le nord-est de 2,15 cm par an. La plaque arabique se déplace vers le nord-est à une vitesse de 4,65 cm par an. La plaque indienne se déplace vers le nord à une vitesse de 6 cm par an. La plaque eurasiatique se déplace vers le nord-ouest en Europe et vers le sud-est en Asie à une vitesse de 0,95 cm par an.
  3. Dar-es-Salam
  4. Baur et Leroy, A travers le Zanguebar, 1882 - En ligne. Le Roy, D'Aden à Zanzibar, 1894 - En ligne.
  5. JC
  6. Voir le chapitre "R de rien" dans l'article "Qarmates"
  7. Mahométien désigne celles et ceux qui croient que Mahomet est un prophète - les musulmans - comme le terme de christien désigne les chrétiens adeptes de Jésus aka Christ ou celui de moïsien pour parler des adeptes de Moïse, les juifs.
  8. Paul Bonnenfant (dir.), "Le sultanat d’Oman", La péninsule arabique d’aujourd’hui, Vol II Pays par pays, Éditions du CNRS, 1982. Voir le chapitre "Un rien sur Oman" dans l'article "Guerre du Dhofar"
  9. Selon les mythes mahométiens, le kharidjisme est né de la discorde quant à la succession du défunt prophète. Le cadavre est encore chaud. Rigoriste et égalitariste, le kharidjisme rejette les liens de sang ou tribaux pour préférer désigner le plus croyant d'entre eux, même s'il est ancien esclave, et n'hésitent pas à le faire savoir par les armes et la contrainte. Introduit vers la fin du VIIème siècle dans la région d'Oman, l'ibadisme est une version réformée du kharidjisme dont il se différencie par son pacifisme et sa gestion "laïque" du fait religieux. Cyrille Aillet, "L’ibâdisme, une minorité au cœur de l’islam", Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, n° 132, 2012 - En ligne. Heinz Halm, Le chiisme, Presses Universitaires de France, 1995. Sur le kharidjisme voir Moncef Gouja, La grande discorde de l’islam. Le point de vue des kharéjites, L’Harmattan, 2006. Hichem Djaït, La grande discorde. Religion et politique dans l’islam des origines, Gallimard, 1989.
  10. En 1850, entre 14000 et 15000 sont importés pour les cultures. Entre 1830 et 1873, environ 700000 hominines sont revendus sur les marchés aux esclaves de l'archipel. L'abolition a pour conséquence immédiate l'augmentation du prix de l'esclave.
  11. Emily Ruete, Mémoires d'une princesse arabe