Ultracrépidarien : Différence entre versions

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Les origines gréco-romaines sont évidentes pour toutes celleux qui sont sensibles aux langues anciennes et aux modes vestimentaires de l'antiquité. Le terme latin ''crepida'' qui signifie "sandale" est facilement reconnaissable. Du grec ''κρηπίς'' (krepis). La langue française conserve le mot ''crépide'' pour désigner des sandales basses. L'historien antique Pline l'Ancien relate une discussion entre un peintre et un cordonnier qui commente son tableau. Mettant fin immédiatement aux critiques, l'artiste peintre assène sa punchline : "''Sutor, ne supra crepidam''". La traduction est "''Cordonnier, pas plus haut que la sandale !''" Ainsi il lui rappelle que ses compétences ont une limite. Et cela fonctionne pour tout le monde. Une variante de l'expression populaire qui affirme qu'il ne faut pas péter plus haut que son cul. L'expression en latin permet de briller en société, même sans la traduction, alors que la seconde est cantonnée aux sphères plus intimes. Pour des raisons que nous ignorons, ''supra'' est progressivement remplacé par ''ultra''. Le sens de l'expression n'en est pas altéré car ''ne supra'' signifie "pas au-dessus" alors que ''ultra'' renvoie aux extrêmes limites. Ainsi épuré de sa négation l'expression se fait mot, ''ultracrepidar'' qu'il est possible de traduire en [[français]] par "outre-sandaler". Le synonyme le plus proche est peut-être ''outrepasser''. Faut-il voir dans l'expression "''Avoir les chevilles qui gonflent''" une variante moderne qui se réfère elle aussi à la même partie du corps des hominines et qui indique que l'on déborde des limites que sont nos chaussures ? Et, par extrapolation, se mettre dans une situation intellectuelle dans laquelle le fantasme est vérité ?  
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Les origines gréco-romaines sont évidentes pour toutes celleux qui sont sensibles aux langues anciennes et aux modes vestimentaires de l'antiquité. Le terme latin ''crepida'' qui signifie "sandale" est facilement reconnaissable. Du grec ''κρηπίς'' (krepis). La langue française conserve le mot ''crépide'' pour désigner des sandales basses<ref>Une crépide désigne la sandale et un crépide (ou crépis) une plante. Voir "crépis" dans le ''Trésor de la Langue Française'' - [https://www.cnrtl.fr/definition/crépis En ligne]</ref>. L'historien antique Pline l'Ancien relate une discussion entre un peintre et un cordonnier qui commente son tableau. Mettant fin immédiatement aux critiques, l'artiste peintre assène sa punchline : "''Sutor, ne supra crepidam''". La traduction est "''Cordonnier, pas plus haut que la sandale !''" Ainsi il lui rappelle que ses compétences ont une limite. Et cela fonctionne pour tout le monde. Une variante de l'expression populaire qui affirme qu'il ne faut pas péter plus haut que son cul. L'expression en latin permet de briller en société, même sans la traduction, alors que la seconde est cantonnée aux sphères plus intimes. Pour des raisons que nous ignorons, ''supra'' est progressivement remplacé par ''ultra''. Le sens de l'expression n'en est pas altéré car ''ne supra'' signifie "pas au-dessus" alors que ''ultra'' renvoie aux extrêmes limites. Ainsi épuré de sa négation l'expression se fait mot, ''ultracrepidar'' qu'il est possible de traduire en [[français]] par "outre-sandaler". Le synonyme le plus proche est peut-être ''outrepasser''. Faut-il voir dans l'expression "''Avoir les chevilles qui gonflent''" une variante moderne qui se réfère elle aussi à la même partie du corps des hominines et qui indique que l'on déborde des limites que sont nos chaussures ? Et, par extrapolation, se mettre dans une situation intellectuelle dans laquelle le fantasme est vérité ?  
  
 
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Le gentilé ultracrépidarien a une histoire complexe, qui est encore à écrire. L'utilisation de ''ultra'' dans le sens de ''outre'', c'est à dire en périphérie, permet de déterminer que ces hominines vivent dans le pourtour d'une collectivité. Ou dans sa partie haute s'il y a un léger glissement de sens. Les recherches ont permis de préciser qu'il s'agissait sans doute du toponyme Crépy. Celui-ci est utilisé en France pour nommer quelques communes et hameaux. Il vient probablement du latin ''crispus'' "frisé, ondulé" dont le français moderne a conservé ''crépu'' et ''crêpé'' avec ces sens. Généralement, les hominines habitant un quelconque Crépy sont crépynois et crépynoises.
 
Le gentilé ultracrépidarien a une histoire complexe, qui est encore à écrire. L'utilisation de ''ultra'' dans le sens de ''outre'', c'est à dire en périphérie, permet de déterminer que ces hominines vivent dans le pourtour d'une collectivité. Ou dans sa partie haute s'il y a un léger glissement de sens. Les recherches ont permis de préciser qu'il s'agissait sans doute du toponyme Crépy. Celui-ci est utilisé en France pour nommer quelques communes et hameaux. Il vient probablement du latin ''crispus'' "frisé, ondulé" dont le français moderne a conservé ''crépu'' et ''crêpé'' avec ces sens. Généralement, les hominines habitant un quelconque Crépy sont crépynois et crépynoises.
  
La mythologie nationaliste française s'est construite au fil des siècles. À l'intérieur de ses frontières, la France a inventé les cultures régionales en folklorisant les pratiques culturelles et linguistiques locales. Que ce soit les paysages, les industries, les gastronomies ou les habits, par exemple, la moulinette nationaliste en a redessiné les contours. Pour les figer. Le redécoupage administratif se couple de spécialisations régionales sur le plan agricole, paysager et industriel. Le modelage de ces "particularismes régionaux" a été instrumentalisé à des fins politiques et économiques<ref>D'après [[F. Merdjanov]], ''Les ruches horizontales, une apiculture de la paresse'', inédit, non daté. </ref>. Faut-il deux départements normands ou un seul ? Doit-on dire savoyard ou savoisien ? Le roquefort est-il meilleur que la tome ou le camembert ? Le [[Nissard|niçois]] est-il une langue ? La charolaise n'est-elle pas un peu normande ? Aussi cruciales puissent-elles paraître, ces questions restent néanmoins en suspens. Elles sont toujours des sujets d'intérêt, de discorde et de lutte pour celleux qui n'ont rien trouvé de mieux à faire. Les modifications en 2015 du découpage administratif de la France, qui passe de 27 régions à 18, ont suscité de nombreux débats et controverses. Quel nom choisir pour les futures nouvelles régions ?  
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La mythologie nationaliste française s'est construite au fil des siècles. À l'intérieur de ses frontières, la France a inventé les cultures régionales en folklorisant les pratiques culturelles et linguistiques locales. Que ce soit les paysages, les industries, les gastronomies ou les habits, par exemple, la moulinette nationaliste en a redessiné les contours. Pour les figer. Le redécoupage administratif se couple de spécialisations régionales sur le plan agricole, paysager et industriel. Le modelage de ces "particularismes régionaux" a été instrumentalisé à des fins politiques et économiques<ref>D'après [[F. Merdjanov]], ''Les ruches horizontales, une apiculture de la paresse'', inédit, non daté. Et le chapitre VI de F. Merdjanov (Attribué à), ''L'équation corse à la lumière de l'inconnue macédonienne. (Im)précis de nihilisme montagnard et de contre-imaginaire historique'' - [http://analectes2rien.legtux.org/images/PDF/CORSE_MACEDOINE.pdf En ligne]</ref>. Faut-il deux départements normands ou un seul ? Doit-on dire savoyard ou savoisien ? Le roquefort est-il meilleur que la tome ou le camembert ? Le [[Nissard|niçois]] est-il une langue ? La charolaise n'est-elle pas un peu normande ? Aussi cruciales puissent-elles paraître, ces questions restent néanmoins en suspens. Elles sont toujours des sujets d'intérêt, de discorde et de lutte pour celleux qui n'ont rien trouvé de mieux à faire. Les modifications en 2015 du découpage administratif de la France, qui passe de 27 régions à 18, ont suscité de nombreux débats et controverses. Quel nom choisir pour les futures nouvelles régions ?  
  
 
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Version du 9 septembre 2020 à 12:23

Ultracrépidarien. Comportement qui consiste à parler de sujets que l'on ne connaît pas.



Attention.jpg

Attention, cet article ne cite pas suffisamment ses sources.



Éthique mologique

La recherche des origines et des sens des mots ou des expressions, à travers le temps et l'espace, est une discipline linguistique qui prête le flanc aux critiques. Tant pour ses méthodes que pour ses conclusions. Les pratiques linguistiques ne sont pas choses immuables, elles se modifient, se contredisent, se ressemblent et divergent au fil des siècles. L'orthographe est mouvante, les genres s'inversent, les sens glissent et les usages fluctuent. La compréhension d'un mot ou d'une expression est bien plus le miroir d'une situation présente que d'une quelconque ancienne interprétation. La langue dite française n'échappe pas à ces problématiques. L'éthique mologique — contraction de mot et de logique, étymologie en langage SMS — est une démarche scientifique qui vise à offrir une écriture de l'histoire de la représentation graphique d'une langue, ainsi qu'une lecture temporelle de ses glissements de sens. Les choix et les interprétations ne sont pas neutres. Accepter, par exemple, l'orthographe ph à nénuphar est le marqueur d'un hypothétique emprunt au grec alors qu'opter pour nénufar rend visible l'origine arabe de ce mot de la langue française standardisée. L'enjeu n'est jamais simplement linguistique, il s'inscrit toujours dans un contexte social particulier. Une réforme récente préconise maintenant la présence du f dans le cadre d'une simplification de l'orthographe. Considérer que l'expression "Remède de bonne-femme" tire ses origines de l'hominine femelle et doit donc s'écrire ainsi s'appuie sur un raisonnement logique qui, soit assigne ces femelles à un rôle social intangible, soit argumente contre les constructions sociales de genre. Dans les deux cas, cela repousse l'hypothèse qu'elle puisse être une déformation de "bon fame", c'est à dire "de bonne réputation". Le sens de "réputation", de "rumeur" et de "renommée" est attesté dès le XIVème siècle après JC[1]. Emprunté au latin fama qui a le même sens, ce terme est aussi utilisé au féminin. La famée est la réputation. Le français a conservé les termes de fameux, fameuse et fameusement et les expressions "bien famé" et "mal famé". Sage fame des lexiques et des dictionnaires, l'éthico-mologiste est littéraire et n'entend rien à la pratique.

Je dis ça, je dis rien

Afin de clarifier les sens possibles de ultracrépidarien des recherches ont été menées par la communauté protivophile. Habituellement source de rien, la protivophilie relève ici quelques propos de celleux qui savent tout.

Relevé n°1

Racine carrée de 1721344 ?

Ultracrépidarien se compose des trois racines que sont ultra, crépidar et rien. Emprunté au latin, ultra exprime l'excès. Tout ce qui est ultra est teinté de débordements. Le français conserve outre pour désigner le dépassement d'une limite. Dans sa géographie, ses anciennes colonies d'outre-mer sont ultra-marines. Ultra- est essentiellement utilisé en tant que préfixe, seul l'usage populaire emploie une forme nominale pour nommer les fanatiques des pratiques sportives liées au football : les "Ultras". Rien n'est dit sur son genre grammatical mais la réalité en fait un usage principalement masculin. Crépidar est très similaire à une forme verbale dérivée de crespine la "chance", issue du continuum roman occidental, ou de crespinada le fait d'en avoir. Comme dans de nombreux autres mots du français, l'accent aiguë marque l'ancienne notation es. D'autres arguent des proximités entre "crépidar" et "crépiter" et pointent les nombreux cas de notation de sonorités proches qui font passer dans l'usage un t plutôt qu'un d ou l'inverse. Historiquement ce processus se retrouve dans de nombreuses pratiques linguistiques. L'anglais et l'allemand standardisés partagent nombre de mots dont l'écriture d'un d de début de mot dans l'un est un t dans l'autre. Dérivé du latin crepitare, crépiter signifie "émettre un bruit sec de manière répétée". Des applaudissements peuvent crépiter. Le feu aussi. L'hypothèse crespinada défend que la terminaison nada est très proche d'un terme similaire en castillan qui se traduit en français par "rien" et ressemble énormément au nom du hameau de Rien dans la Drôme. Les pratiques linguistiques de la Drôme sont en effet parentes de celles de la péninsule ibérique. Pour elle, par un processus de traduction approximative en français standardisé, crépidarien se fait gentilé des hominines du hameau de Rien. Qui ont la chance d'être à Rien. Pour les autres, l'assemblage de "crépiter" et de "rien" désigne les hominines qui se réjouissent de vivre dans ce hameau et le font savoir de manière bruyante. Malgré leurs approches différentes, les analyses linguistiques se rejoignent sur le fait que ultracrépidarien soit couramment utilisé pour nommer les Ultras du hameau de Rien. N'ayant aucune équipe à soutenir, ces ultras se faufilent discrètement dans des matchs de football et signalent leur présence par des devinettes. Le feu est dans les tribunes. Des pots de miel et des bouteilles de jus de pomme produits dans la région de Rien sont jetés sur les joueurs des deux équipes. Leur devise ? "Rien à foot !"

Relevé n°2

La composition du mot ultracrépidarien indique clairement ses aspects racistes et validistes. Dans sa définition la plus large, le racisme est l'ensemble des comportements discriminatoires et des préjugés à l'encontre d'une population d'hominines parce qu'elle est jugée différente. Les critères sont généralement en lien avec les nuances de couleurs de l'épiderme des hominines, les origines géographiques multiples c'est à dire les lieux de naissance non choisis, ou les "différences culturelles". Le validisme, quant à lui, procède d'une somme de comportements et de préjugés qui se concentrent contre les personnes ayant un handicap physique ou mental.

En français, le terme crépi désigne un enduit passé sur des murs avec un rendu non lisse, légèrement granuleux. Dans les pratiques linguistiques dites argotiques, le crépi est utilisé en synonyme de peau ou de maquillage. Dans un cas, le parallèle est fait entre l'épiderme et l'enduit qui recouvre les constructions et leurs ossatures. Il peut parfois être employé de manière péjorative pour stigmatiser un aspect boutonneux ou une peau à l'aspect irrégulier. Dans l'autre, le crépi est assimilé à une opération d'embellissement ou de dissimulation. Être décrépi, c'est être d'aspect endommagé ou vieilli. Des usages sexistes persistent dans les pratiques linguistiques qui consistent à parler de "décrépie" dans le sens de "hominine femelle marquée par (ou pour) son âge". L'expression "Se faire refaire le crépi" s'emploie pour parler d'un remaquillage manuel ou d'une opération esthétique chirurgicale, mais aussi lorsque l'on vient de se faire bastonner au visage ou sonne comme une menace.

Langue des signes ou geste barrière ?
Inévitablement, darien renvoie à la province du même nom située dans le sud du Panama, le Darién. Cette région abrite une population d'hominines qui furent au centre de polémiques racistes au cours du XXème siècle. En effet, ayant en son sein une forte proportion d'albinos, la communauté guna secoue alors des esprits qui voient en elle de mystérieux descendants d'antiques colons européens ou d'une ancienne installation d'extra-terrestres ! Ceci devant expliquer la présence de ces hominines à la peau blanche et aux cheveux clairs parmi les gunas. Finalement les recherches menées à cette époque aboutirent à la conclusion de nous étions bien en présence d'hominines ayant un fort taux d'albinisme et qui, de plus, est un albinisme particulier. Tout simplement. Les découvertes scientifiques de ces deux derniers siècles n'ont pas fait taire les théories racistes. Ces dernières se sont adaptées, particulièrement dans la sémantique employée. Plus question de noirs mais de blacks ou d'afro-, plus de blancs mais des caucasoïdes ou des leucodermes. C'est dans ce contexte langagier qu'il faut situer le caractère raciste du mot composé crépidarien : il désigne la couleur de peau des gunas du Darién. Par ce stratagème le taux d'albinisme redevient un "marqueur racial", pour reprendre l'ancienne terminologie. À moins d'aimer farfouiller avec les doigts au fond d'un sac à vomi, il est impossible de confirmer son emploi dans ce sens mais son ambiguïté est réelle.

L'adjonction du préfixe ultra n'enlève en rien cette ambiguïté car le terme ultracrépidarien peut, là encore, avoir des relents racistes en laissant à penser qu'il nomme les adeptes extrémistes d'une fantasque cause crépidarienne. Ce sens "extrémiste" est attesté dès le XVIIIème siècle dans la langue française et donne même lieu à la création des termes ultraïsme et ultracisme. Mais il n'en est rien. Dans une attitude très validiste, il désigne avec beaucoup de mépris les hominines atteints du syndrome dit des Enfants de la Lune. Derrière cette appellation poétique se cache le xeroderma pigmentosum, un dysfonctionnement génétique qui se caractérise par une hyper-sensibilité aux rayons solaires. La peau et les yeux de ces hominines ne supportent pas une exposition prolongée sans risquer de graves brûlures et des cancers. La seule protection réelle possible est une sortie de nuit ou avec un scaphandre de protection. L'albinisme n'est pas aussi extrême, même si ses symptômes sont très proches. Si des lynchages ne viennent pas perturber leurs quotidiens, les albinos peuvent avoir une vie sociale. Du point de vue anti-validiste, utiliser ultracrépidarien pour désigner les hominines atteint de ce syndrome génétique est du même niveau que dire d'une personne ayant un handicap physique, quel qu'il soit, qu'elle est polyo ! Tout comme "mongolien" n'est pas une insulte !

Relevé n°3

Disposant d'ouvrages dont on ne connaît pas les origines exactes, des hominines avancent que ultracrépidarien est le nom que se donne un petit groupe d'hominines. Les sources sont multiples et contradictoires. Certaines s'appuient sur des raisonnements religieux et voient dans ce terme la réminiscence d'une hérésie, ils plaident l'erreur du copiste et proposent une éthique mologique différente : place à ultracrédidarien. Dans ce cas, il paraît évident que l'on a à faire à des hominines que "ne portent vraiment crédit à rien".

Comme par hasard les météorites tombent dans les cratères sans endommager les habitations alentours. Comme par hasard !?

Mais cela ne convainc pas les adeptes d'approches plus rationalistes. Comment expliquer que les ultracrépidariens se cachent derrière des masques et complotent la nuit au prétexte qu'illes ont une maladie soit-disant génétique ? L'absence de découvertes autour d'un traitement montre clairement qu'elle n'existe peut-être tout simplement pas. Par ailleurs, ce mot commence de la même façon que ultraconfidentiel. Pour d'autres encore, les gestes barrières préconisés lors de la dernière pandémie en date sont une tentative des ultracrépidariens d'imposer un mode vie et une sociabilité distanciées. Grace à l'apparition de nombreux articles et documentaires sur le réseau internet autour des Enfants de la Lune, pour faire connaître leur situation tragique, des complotistes en tout genre ont découvert une communauté virtuelle qui vit dans l'ombre. Enfin. Que veulent-illes vraiment ? Qui sont-illes ? Pourquoi ne tombent-illes pas les masques ? Que cachent-illes réellement ? Ces questions taraudent la communauté complotiste car tous les ingrédients sont réunis pour de belles élucubrations. S'agit-il de manipulations souterraines pour faire accepter les risques liés aux ondes de la 5G ? Les ultracrépidariens sont-illes de simples exécutants à la solde des intérêts des entreprises de communication ou les véritables artisans de tout cela ? Ont-illes conscience que les reptiliens menacent tous les hominines ? Même les ultracrépidariens. Ou que les extra-terrestres sont à nos portes ? L'agitation complotiste ne cesse de questionner. De ce point de vue elle est bien moins dogmatique que les théories religieuses ou politiques. Même si les préjugés et les fantasmes existent toujours autour des moïsiens, dans les combats souterrains qui se mènent pour diriger ou détruire le monde existant, les "juifs et les franc-maçons" n'ont plus le monopole, et doivent maintenant affronter des entités hybrides d'entreprises gigantesques et de forces obscures venues dont on ne sait où, des êtres invisibles qui nous observent et des faiseurs de catastrophes. Contrairement aux évidences partagées, l'univers des super-héros nord-américains est exclu de cet imaginaire car illes ne sont, semble-t-il, pas des personnes réelles. De nombreuses images circulent montrant les effets spéciaux visuels sophistiqués utilisés pour berner le grand-public.

Pour les plus sceptiques, il est important de les rassurer en rappelant que la croyance en un dieu ou en l'existence de la licorne rose invisible ne sont pas très différentes. Le premier est invisible et insaisissable alors que la seconde se cache habilement dans les angles morts de la vision des hominines. Si l’idolâtre créé l'idole sans qu'il soit nécessaire d'en fournir une preuve de l'existence réelle, et être pris au sérieux, le complotiste peut créer tranquillement le complot sans avoir à se justifier. Pour un cerveau imprégné de complots, ceux-ci sont tout aussi réels que dieu ou la licorne. En tous les cas, les preuves ne sont pas moins maigres et fragiles. Il n'y a rien.

Pourquoi nous donnent-ils un architecte tout-puissant et qui se mêle, à chaque instant, à notre vie ? Il n’y a rien de vrai dans cette histoire. Mais la vérité doit être ailleurs. Où ? Je n’en sais rien.[2]

Relevé n°4

Les origines gréco-romaines sont évidentes pour toutes celleux qui sont sensibles aux langues anciennes et aux modes vestimentaires de l'antiquité. Le terme latin crepida qui signifie "sandale" est facilement reconnaissable. Du grec κρηπίς (krepis). La langue française conserve le mot crépide pour désigner des sandales basses[3]. L'historien antique Pline l'Ancien relate une discussion entre un peintre et un cordonnier qui commente son tableau. Mettant fin immédiatement aux critiques, l'artiste peintre assène sa punchline : "Sutor, ne supra crepidam". La traduction est "Cordonnier, pas plus haut que la sandale !" Ainsi il lui rappelle que ses compétences ont une limite. Et cela fonctionne pour tout le monde. Une variante de l'expression populaire qui affirme qu'il ne faut pas péter plus haut que son cul. L'expression en latin permet de briller en société, même sans la traduction, alors que la seconde est cantonnée aux sphères plus intimes. Pour des raisons que nous ignorons, supra est progressivement remplacé par ultra. Le sens de l'expression n'en est pas altéré car ne supra signifie "pas au-dessus" alors que ultra renvoie aux extrêmes limites. Ainsi épuré de sa négation l'expression se fait mot, ultracrepidar qu'il est possible de traduire en français par "outre-sandaler". Le synonyme le plus proche est peut-être outrepasser. Faut-il voir dans l'expression "Avoir les chevilles qui gonflent" une variante moderne qui se réfère elle aussi à la même partie du corps des hominines et qui indique que l'on déborde des limites que sont nos chaussures ? Et, par extrapolation, se mettre dans une situation intellectuelle dans laquelle le fantasme est vérité ?

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Afin d'en faire un terme qui défie les modes de la sandale, de la chaussure, de la basket ou de la tong, le terme outre-sandaler ne voit pas le jour : il lui est préféré celui de ultracrepidar qui se forge sur une racine gréco-romaine. Pour autant, nulle trace du verbe ultracrepider dans la langue française. Verbe simple du premier groupe, il se conjuguerait comme rêver, imaginer ou inventer. Maintenir une racine antique permet à un mot de paraître plus savant, plus profond. Son avantage principal est de le rendre illisible pour celleux qui n'entravent rien aux langues anciennes. Un peu comme les articles qui font des citations en grec ou en latin sans prendre la peine de proposer des traductions en bas de page.

Aut omne aut nihil[4]

Le processus de francisation est assez classique. À la racine nouvellement créée, ultracrepidar, est ajoutée une terminaison en -ien qui marque en français une appartenance ou une spécificité. Cette hypothèse réduit à néant les arguments qui font des liens entre l'éthique mologique de ce terme et le hameau de Rien. Cette terminaison transforme la forme verbale en adjectif et un accent aiguë est mis sur le e. Ultracrépidarien est devenu un mot existant. La plus ancienne utilisation recensée de ce terme date de 1819 par l'écrivain britannique William Hazlitt dans A letter to William Gifford. Par qui est-il utilisé ? En effet, il semble que l'attitude qu'il qualifie soit bien plus répandue que le terme lui-même. Il serait beaucoup trop long — sans doute une encyclopédie entière [5] — de lister ici les domaines de la vie sociale des hominines lors desquels des comportements ultracrépidariens peuvent être constatés. Pas plus annuaire qu'adepte de la délation, le wikimerdja n'a pas la volonté de révéler les noms des hominines qui agissent ainsi [6].

Il est nécessaire de manipuler avec précautions les arguments car ils alimentent parfois des thèses hurluberlues. L'éthique mologique grecque n'est pas une donnée ignorée par les complotistes et autres anti-ultracrépidariens. Illes l'exploitent et cherchent à y déceler des données nouvelles pour mener à bien leur combat. Bien qu'elle ne soit pas révélée au grand jour — pour ne pas perdre l'avantage tactique — l'information circule que l'allusion à la sandale est en fait une indication déguisée. À l'image du talon d'Achille de la mythologie grecque antique, elle indiquerait le point faible des ultracrépidariens. La zone autour de la cheville — sans plus de précisions — est donc celle qui faut viser pour en venir à bout lors d'une attaque. Dans ce discours l'ancienneté est argument de véracité. La "sagesse populaire" et la "culture ouvrière" le savent très bien, l'expression "Ne pas arriver à la cheville" a toujours eu un double sens.

Relevé n°5

Le gentilé ultracrépidarien a une histoire complexe, qui est encore à écrire. L'utilisation de ultra dans le sens de outre, c'est à dire en périphérie, permet de déterminer que ces hominines vivent dans le pourtour d'une collectivité. Ou dans sa partie haute s'il y a un léger glissement de sens. Les recherches ont permis de préciser qu'il s'agissait sans doute du toponyme Crépy. Celui-ci est utilisé en France pour nommer quelques communes et hameaux. Il vient probablement du latin crispus "frisé, ondulé" dont le français moderne a conservé crépu et crêpé avec ces sens. Généralement, les hominines habitant un quelconque Crépy sont crépynois et crépynoises.

La mythologie nationaliste française s'est construite au fil des siècles. À l'intérieur de ses frontières, la France a inventé les cultures régionales en folklorisant les pratiques culturelles et linguistiques locales. Que ce soit les paysages, les industries, les gastronomies ou les habits, par exemple, la moulinette nationaliste en a redessiné les contours. Pour les figer. Le redécoupage administratif se couple de spécialisations régionales sur le plan agricole, paysager et industriel. Le modelage de ces "particularismes régionaux" a été instrumentalisé à des fins politiques et économiques[7]. Faut-il deux départements normands ou un seul ? Doit-on dire savoyard ou savoisien ? Le roquefort est-il meilleur que la tome ou le camembert ? Le niçois est-il une langue ? La charolaise n'est-elle pas un peu normande ? Aussi cruciales puissent-elles paraître, ces questions restent néanmoins en suspens. Elles sont toujours des sujets d'intérêt, de discorde et de lutte pour celleux qui n'ont rien trouvé de mieux à faire. Les modifications en 2015 du découpage administratif de la France, qui passe de 27 régions à 18, ont suscité de nombreux débats et controverses. Quel nom choisir pour les futures nouvelles régions ?

Recyclage commercial

Deux villes nommées Crépy se situent dans la région picarde, l'une dans le département de l'Oise, l'autre dans l'Aisne. La Picardie comprend aussi le département de la Somme. Avec la réforme territoriale, la Picardie est unie au Nord-Pas-de-Calais début 2016 pour former les Hauts-de-France. Heuts-d'Franche en langue picarde. Les communicants comprennent qu'un rien peut être un petit quelque chose. Les hominines de la Somme sont renommés samariens et celleux de l'Oise, isariens. Idem dans d'autres régions où les départements dans lesquels coule la Loire sont dorénavant ligériens et un comportement occitarien consiste à consommer de préférence la production locale de la région Occitanie. Des formes féminisées sont aussi adoptées. Ne désirant sans doute pas demeurer à l'écart de la modernité, les hominines du Crépy isarien — Crépy-en-Valois dans l'Oise — sont sensibles à ces questions. Est-il concevable de nos jours d'avoir un gentilé aussi ridicule et vieillot ? Pour les hominines outre-isariens, crépynois évoque le pays de la crépinette, une préparation culinaire à base de viande hachée enroulée et cuite dans une membrane "qui relie deux viscères entre eux", et, parce que le français a référencé crêpe dans le sens de "ornement de tête", crépynoise fait penser à une coiffure traditionnelle locale. Rien n'est plus faux. Selon la légende urbaine qui se dessine à Crépy, c'est après une partie de scrabble mouvementée à la ludothèque municipale crépynoise que fut remarqué l'anagramme entre crepida et picarde. Cette découverte est fondamentale pour l'éthique mologique de ultracrépidarien. L'idée naît de forger le néologisme crépidarien pour marquer tout autant sa picardité que son côté isarien et son encrage à Crépy. Le petit commerce se réjouit, la mairie exulte et les hominines crépidariénisés. Là encore une version féminisée a été adoptée. Dans d'autres villes et régions françaises, plutôt que prendre des risques pour rien, il est préféré de s'appuyer sur des valeurs sûres et universelles, ACAB, quitte à être accusé de récupération. L'Association Culturelle des Amis Bordelais et l'Association des Commerçants et Artisans de Bitche en sont de bons exemples. "Il y a fort à parier !", comme il se dit dans les rues crépidariennes, que cette situation va dégénérer. Les premiers tags anglo-picards "All Crepidarians Are Billatches"[8] ne vont pas tarder à apparaître sur les murs de la ville. Surtout dans l'hyper-centre crépidariénisé. Des personnes — qui préfèrent garder l'anonymat — affirment que les outre-crépidariens sont en colère. Dans des cas comme cela, la rumeur enfle. Se réappropriant le qualificatif péjoratif qui leur est assigné, les outre-crépidariens se font ultracrépidariens. Illes sont les hominines de Crépy qui ne bénéficient en rien de la politique de la ville. Moins caricaturale que sa version crépidarienne, l'univers ultracrépidarien est tout en nuance. Y coexistent des supra, des hyper et des haut. Et quelques autres encore. De quoi se "crêper le chignon" pour longtemps encore !

Seul le futur nous dira si ce mot ultracrépidarien voit réellement le jour dans ce contexte du Crépy isarien. Si non, il n'aura jamais existé.

Notes

  1. Tout d'abord ornementé du prénom Brian, il est contraint d'en changer pour éviter toute ressemblance avec une personne réellement existante. Il est incité par ses proches à se lancer dans une carrière de comique, son style est ultracrépidarien. Il parvient à tout dire alors qu'il ne sais rien. À titre d'exemple, il ne sait même pas que dieu n'existe pas ! Pour ce projet il opte pour le pseudonyme Jonathan Cohen, mais, déjà utilisé par un autre comique, il doit se résoudre à en trouver un nouveau. Chagriné par cette situation, il proclame l'obligation de baptême. Avec ce système de copyright, il sera dorénavant Jésus Christ aka JC, le seul, le grand inspirateur ultracrépidarien. Voir le documentaire La vie de Brian daté de 1979 après lui-même.
  2. Extrait de Panaït Istrati, Oncle Anghel. Cité à l'entrée "x-files" dans F. Merdjanov, Analectes de rien, 2017
  3. Une crépide désigne la sandale et un crépide (ou crépis) une plante. Voir "crépis" dans le Trésor de la Langue Française - En ligne
  4. "Ou tout ou rien". Expression latine régulièrement utilisée par Ladislav Klíma. Cité à l'entrée "aut deus aut nihil" (ou dieu ou rien) dans F. Merdjanov, Analectes de rien, 2017
  5. Pour une critique d'un tel projet, voir une discrète et très partielle tentative appelée wikimerdja - En ligne
  6. Tout le monde en connaît !
  7. D'après F. Merdjanov, Les ruches horizontales, une apiculture de la paresse, inédit, non daté. Et le chapitre VI de F. Merdjanov (Attribué à), L'équation corse à la lumière de l'inconnue macédonienne. (Im)précis de nihilisme montagnard et de contre-imaginaire historique - En ligne
  8. En langue anglaise de l'ouest nord-américain, biatch est une déformation de l'argotique bitch qui signifie "pute" ou "salope". Au sens figuré ce terme désigne les personnes que l'on méprise, quelque soit leurs genres ou leurs métiers.