Féralité

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Féralité. ( en macédonien - fèralitat en nissard)


[En cours de rédaction]


Étymologie

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Féralité se décompose en féral et le suffixe -ité qui, en français, est utilisé pour former un nom à partir d'un adjectif. Ainsi la féralité caractérise ce qui est féral. Ce dernier se compose de la racine fér et du suffixe -al qui permet de former un adjectif. Comme fécal·e ou normal·e, qui renvoient respectivement aux fèces — le caca — et à la norme, le terme de féral qualifie ce qui se rapporte à l'étymon latin fera, la "bête sauvage". Cette racine se retrouve dans la plupart des langues latines avec des sens proches. Du nissard fèra au portugais fera, en passant par le roumain ou le provençal, la racine latine conserve des sens se rapportant aux animaux non-hominines [1]. Plusieurs mots, composés à partir de cette racine latine, sont attestés dans les pratiques linguistiques anciennes d'après les dictionnaires et lexiques de langue française édités dans le courant du XIXème siècle après JC [2]. Le Lexique de l'ancien français, publié en 1890 par Frédéric Godefroy, répertorie dans les textes anciens les formes adjectivales feral·e, ferage, ferain·e, ferin·e et ferasche pour qualifier l'aspect "sauvage" ou "cruel" de quelque chose. Selon sa recension, à la fin du XVème siècle, féral désigne aussi l'hominine — mâle et femelle ? — qui ne respecte pas une parole donnée, colérique et qui a des mœurs "semblables à beste sauvage". Une fere est une "bête sauvage" et le ferin désigne le gibier. Alors que les normes orthographiques ne sont pas encore fixées, il note aussi dans son Dictionnaire de l'ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle l'existence de ferrain, ferein, farain, farein, faraing, ferain, ferien et foren. Alors que fere et ferin·e sont mentionnés dans A dictionarie of the French and English tongues de Randle Cotgrave en 1611, avec le sens de "bête sauvage" pour le premier et de "cruauté" et de "sauvagerie" pour le second, aucune des huit éditions successives du dictionnaire de l'Académie française, entre 1694 et 1935, ne recensent ces mots. Le Littré de 1873 indique que férin et férine s'utilisent dans un contexte médical pour désigner des pathologies particulièrement dangereuses [3]. Selon lui, une toux peut être férine et un ulcère férin. L'absence quasi complète de ces mots issu du latin fera dans les dictionnaires officiels n'est évidemment pas le reflet des pratiques linguistiques réelles des hominines. "Rien à voir" comme l'affirme le linguiste piscicole Jean Tenenbaum [4], grand spécialiste de "Ferrat". La neuvième édition du dictionnaire académique concède l'utilisation de quelques dérivés dans les zones francophones autour du lac Léman. Ferrat ainsi que féra et férat désigne une espèce de saumons qui "habite les lacs et qui peut être acclimatée avec avantage dans les grands réservoirs des canaux, à cause de sa grande fécondité" [5]. Outre les "régionalismes" [6] que les dictionnaires omettent et qui sont utilisés dans la vie réelle, la langue française actuelle conserve féroce et farouche ainsi que leurs dérivés. Férocité ou effaroucher par exemple. L'un se compose de l'étymon fér et du suffixe -ox qui exprime le fait de "sembler être". Comme véloce semble faire voler. L'autre signifie "Qui ne se laisse pas facilement approcher et séduire" et "Qui agit avec fermeté, intransigeance, rudesse ou brutalité" selon le Trésor de la langue française. Deux façons d'être sauvage. Sous des formes proches, "féroce" se retrouve dans plusieurs autres langues romanes, tel feroz en castillan et en portugais [7]. L'histoire de farouche ne fait pas l'unanimité. S'agit-il ou non de la métathèse [8] de fourache, l'inversion entre deux sonorités, un phénomène courant dans l'histoire des changements linguistiques ? Cette orthographe est attestée dans certaines régions de l'espace francophone de l'ouest de la France [9], avec des sens liés à la peur ou à la timidité pour les hominines, ou à des notions d'insuffisance de domestication pour les autres animaux. Trop sauvages. Est-ce une mutation de la forme forasche recenser par Frédéric Godefroy à côté de ferasche et farasche avec les sens de "sauvage, dur, insensible" ? Farouche est-il issu de fera, "bête sauvage", ou de fora, "dehors", qui constitue aussi forain·e ? Celleux qui sont en marge, qui sont à l'extérieur. Les hominines, les autres animaux ou les espaces. Par exemple, lorsqu'elles sont distantes du reste de la maison, les toilettes sont dites foraines. La fête aussi peut être foraine.

Depuis le XIXème siècle, l'utilisation moderne de féral·e et de féralité a opéré un léger glissement de sens. La féralité est la situation de ce qui est retourné à l'état sauvage après domestication. La féralité n'est pas seulement une situation fixe mais un mouvement : il ne faut pas confondre chat sauvage et chat féral [10]. Elle est synonyme d'ensauvagement, sans la connotation péjorative de ce mot. Elle peut être rapprochée de l'ancien verbe ensauvagir [11] ou de sauvageté [12]. Pour être au plus proche du sens de "féralité" il convient d'utiliser, suivant le contexte, la forme simple ou la pronominale selon que l'acte d'ensauvagement est passif ou actif : Ensauvager et s'ensauvager ne sont pas de même nature. Les formes masculine et féminine s'écrivent respectivement féral et férale au singulier et prennent un s final au pluriel. La forme masculin pluriel est parfois notée féraux. La féralité s'applique à des espaces, des végétaux et des animaux — hominines compris. La féralisation est ce qui est aussi appelé marronnage [13], le fait de vivre librement après avoir échappé à la captivité. Il s'applique généralement à des animaux non-hominines ayant échappé à la domestication et à des hominines ayant fuit l'esclavage.

L'usage de féral·e et de féralité n'est pas très répandu. Généralement, ils sont employés en zoologie et en botanique. Les incidences croissantes des hominines sur le reste du vivant et l'impact sur l'écosystème planétaire sont si fortes et nuisibles que cela a suscité une utilisation de "féral" et ses dérivés pour décrire des situations où les hominines se retirent afin de freiner la dégradation. Si la féralité appliquée aux plantes et aux animaux non-hominines est d'un usage classique, il l'est moins pour ce qui concerne directement les hominines. Pour la protivophilie, le cas le plus célèbre reste le texte Le Tout, le Rien attribué à F. Merdjanov dans lequel le qualificatif est réapproprié :

Lors de ce déblaiement, je dégage ce qui est immuable, intemporel, mon moi sauvage, ma primitivité et mon instinctivité ; en fait ma primauté. Je ne confonds plus mon but et ma fin. Féral·e je deviens, affranchi·e et libre, absolu·e, autonome. [14]

Enjeux de maux

Notes

  1. hominines
  2. JC
  3. Emile Littré, Dictionnaire de la langue française, tome 2, 1873 - En ligne
  4. Jean Ferrat, "Rien à voir" sur l'album La France, 1969
  5. "Féra" - En ligne
  6. régionalismes
  7. ferocious anglais
  8. métathèse
  9. Par exemple, le berrichon fourache d'après le Petit dictionnaire berrichon - En ligne. Ou le poitevin fouréche et fourache d'après le Dictionnaire poitevin-saintongeais - En ligne
  10. Dit aussi chat haret ou simplement haret, du verbe harer "chasser" car ce félin vit de sa chasse ou de haret, "bord", "limite", car le félin vit en marge. D'après Frédéric Godefroy, Lexique de l’ancien français - En ligne
  11. ensauvagir
  12. sauvageté
  13. marronnage
  14. Le Tout, le Rien attribué à F. Merdjanov - En ligne