Esse longue (Lettre)

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Esse longue. Lettre abandonnée de l'alphabet latin, utilisée pour noter l'actuelle s minuscule. Elle est notée ſ ou .


[En cours de rédaction]


Profondeurs

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Cela fait maintenant plus d'une centaine de millénaires que les hominines[1] utilisent le langage articulé pour communiquer ensemble. Pour se faire, il leur a fallu détourner de leurs fonctions premières les organes buccaux et la gestion de la respiration. En effet, la parole n'est pas une fonction biologique en tant que telle, mais une adaptation puis une apprivoisement d'une configuration anatomique particulière[2]. Un peu comme les plumes qui n'ont pas d'autre fonction première que la régulation thermique chez certains dinosaures terrestres et qui, au fil de l'évolution, sont devenues un artifice indispensable au vol pour la quasi totalité des oiseaux ou une pure décoration encombrante qui empêche tout vol chez le paon. Même si le langage articulé est devenu une caractéristique des hominines, tout comme le vol pour les oiseaux, il n'en reste pas moins que l'absence de capacité de langage articulé chez des individus, pour diverses raisons, ne fait pas moins être hominine. L'impossibilité de vol chez le pingouin ou l'autruche n'en font pas moins des oiseaux. Les grands singes et les chimpanzés — la cousinade des hominines — ne disposent pas de langage articulé pour communiquer alors qu'illes possèdent la capacité anatomique de produire toutes les voyelles. À contrario, des perroquets sont en capacité de reproduire plus d'une centaine de mots, de les utiliser à bon escient et d'en comprendre jusqu'à plusieurs centaines, sans disposer d'une anatomie permettant un langage articulé. Par simple imitation. De la même manière, l'existence de langues sifflées[3] parmi certaines populations d'hominines n'en fait pas pour autant des oiseaux.

L'apparition des premiers langages articulés chez les hominines reste encore un mystère pour les spécialistes du sujet et leur oralité rend impossible d'en savoir plus. Le mythe christien[4] de la Tour de Babel[5] qui proclame une origine commune de toutes les langues des hominines est aujourd'hui largement remis en cause par la paléolinguistique. Jugé trop simpliste, il est maintenant évoqué la possibilité de plusieurs foyers d'apparition de langues articulées indépendamment les unes avec les autres. Les langues les plus anciennes dont nous disposons de traces sont datées du quatrième millénaire avant JC[6] : L'écriture cunéiforme[7] pour noter le sumérien et hiéroglyphique[8] pour l'égyptien. Employé pendant plusieurs millénaires et adapté pour noter plusieurs langues du sud-est méditerranéen, le cunéiforme disparaît dans les premiers siècles après la pseudo-naissance de Jésus. À partir de l'écriture hiéroglyphique apparaissent les premières formes alphabétiques pour transcrire des langues de la région, vers 2000 ans avant lui selon les datations les plus anciennes. Seules les consonnes sont notées par la langue phénicienne, parlée dans l'actuel Proche-Orient. Pour cela, cette écriture consonantique reprend le premier son du nom représenté par le hiéroglyphe. Ainsi le caractère retenu pour noter le son "esse" s'inspire du hiéroglyphe symbolisant une dent car dans la langue phénicienne "dent" se dit "sin". Le premier alphabet phénicien comporte 22 caractères. Grâce à l'importance des cités-États phéniciennes dans cette région orientale de la Méditerranée, cette méthode simplifiée et facile à apprendre se diffuse largement parmi d'autres populations d'hominines qui l'adaptent à leur propre langue vers le IXème siècle avant JC. De cet alphabet phénicien, dans la partie sud-méditerranéenne, dérivent les alphabets araméen, hébreu, syriaque, nabatéen et, de ce dernier, l'alphabet arabe[9]. Dans la partie nord, l'étrusque, le celtibère et le grec adoptent et adaptent cette notation alphabétique à leurs besoins. Très peu utilisée jusqu'alors, la notation des voyelles est nécessaire pour ces langues. Si le celtibère a disparu, cet ancien alphabet grec a donné ce qui deviendra d'une part l'alphabet grec classique, dont dérive le cyrillique, et d'autre part l'étrusque. De ce dernier dérive l'alphabet latin qui comporte alors une vingtaine de lettres.

Cananéen Phénicien Araméen Hébreu Syriaque Nabatéen Arabe Sud-arabique Guèze Grec Cyrillique Étrusque Latin
ɯ 𐡔 𐤔 ש ܫ 𐢝 س 𐩦 Σ ш 𐌔

Formes

Le tracé de chaque lettre de l'alphabet latin se normalise très lentement. Les cursives dites "capitales" sont employées dans la plupart des échanges commerciaux ou officiels du centre de la péninsule italique. Utilisées par l'administration de l'empire de Rome entre le Ier siècle avant JC et le IVème siècle après, elles sont concurrencées par les cursives dites "minuscules". Apparues probablement vers le IIème siècle avant l'autoproclamé messie, elles sont plus adaptées à l'écriture manuscrite. Il n'y a pas de norme véritable et la forme de certaines lettres prête à confusion. Les mots ne sont pas séparés par une espace[10] et les lettres ne sont pas jointes, hormis quelques lettres réunies entre elles lorsqu'elles sont côte à côte, ce que l'on appelle des ligatures. Par l'existence de deux formes différentes — minuscule et capitale — pour la même lettre, l'alphabet latin se structure pour devenir une écriture bicamérale. Cette cursive romaine subit quelques modifications au cours des siècles afin d'en améliorer la lisibilité. Le "b" et le "d" se différencient plus facilement mais le "a" et le "v" se ressemblent fortement avec une forme en "u", tout comme la "r" et la "s" qui ont des graphies proches. Dans cet alphabet latin de 20 lettres, celles-ci se nomment selon la sonorité de la première lettre de son nom grec. Le sigma grec est une esse latine.

Macédoine de graphies[11]

Lorsque l'empire romain se disloque dans le courant du Vème siècle, la cursive romaine est largement utilisée dans les territoires devenus indépendants. Mais la norme est relative car des variantes sont présentes. Les principales graphies qui s'imposent sont la wisigothique dans la péninsule ibérique, l'insulaire en Grande-Bretagne et la mérovingienne dans les territoires de l'ouest européen sous domination des royaumes francs. En dépit des efforts de la dynastie franque mérovingienne de la fin du Vème au milieu du VIIIème siècle, l'écriture mérovingienne n'est pas uniforme et comporte plusieurs variantes mais elles sont assez proches. Les ligatures sont nombreuses et les mots sont rarement séparés. Alors que globalement la cursive capitale est peu modifiée, la minuscule mérovingienne se transforme et se diffuse à travers l'ouest européen[12]. Afin de limiter des erreurs, de faciliter son apprentissage et d'étendre son utilisation, les successeurs des mérovingiens — les carolingiens — réforment les usages à la fin du VIIIème siècle et favorisent de nouvelles normes graphiques pour les lettres. Héritière du ∫ latin, la forme actuelle de la lettre "s" apparaît en parallèle de la forme ſ.

L'expansion du royaume franc à presque toute l'Europe de l'ouest à la fin du VIIIème siècle est un facteur important de la diffusion de la minuscule caroline à travers cette partie du continent. Mais le processus de "normalisation" n'est pas une décision politique carolingienne[13] mais un ensemble complexe de mises en forme dans les milieux érudits de l'empire carolingien.

Usages

Ligatures

Disparitions

Notes

  1. hominines
  2. Pharynx ou connections ?
  3. langues sifflées
  4. christien
  5. Tour de Babel
  6. JC
  7. écriture cunéiforme
  8. écriture hiéroglyphique
  9. Et quelques autres
  10. une espace
  11. Parchemin romain sur les guerres en Macédoine datant de la fin du Ier début du IIème siècle et rédigé avec différentes cursives.
  12. Charles Higounet, "L'écriture latine jusqu'au VIIIe siècle", L'écriture, Presses Universitaires de France « Que sais-je ? », 2003 - [En ligne]
  13. Mythe de Charlemagne et l'école