Français

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Français. (francés en nissard, Француски јазик en macédonien) Langue romane parlée à Nice, en France, en Afrique et en Amérique du Nord. Les Analectes de rien de F. Merdjanov sont rédigés en français.

Auto-définie comme une discipline contre, rejetant les illusions, la protivophilie ne se résout pas à accepter les identités collectives[1] et par conséquent n’accepte pas le principe même de "langue". À l’image des autres sciences humaines, la linguistique s’est construite dans des environnements politiques et historiques qui l’on en partie modelée. Et réciproquement, cette science des langues a marqué de son empreinte des domaines divers. De par cet échange mutuel, il est ainsi aujourd’hui communément admis que les langues sont des réalités "tangibles". Le français est de celles-ci. Cette négation de l’existence des langues vaut pour le macédonien, le nissard ou le bulgare, par exemple, qui sont aussi des créations linguistiques dans des cadres et des desseins politiques précis. Il n’a pour l’instant pas été possible de déterminer si F. Merdjanov est nissardophone, bulgarophone ou macédophone.


Continuum roman occidental

Continuum roman occidental
Au XIXème siècle, l’Europe occidentale forme un large continuum linguistique qualifié de roman occidental[2]. Sur le territoire des actuels Portugal, Espagne, France, Belgique, Suisse et Italie, les usages linguistiques sont alors proches et se différencient par une multitudes de nuances d’une région à l’autre. Le degré d’intercompréhension est divers et reflète les différences historiques, les éloignements géographiques et les influences d’autres continuum. La montée des nationalismes et la création d’États-nations européens vont progressivement fragmenter ce continuum en imposant des langues nationales et standardisées[3]. Le processus est double. D’une part, il s’agit de minimiser des différences afin d’inclure des usages linguistiques proches – devenus ainsi variantes régionales - et d’autre part de maximiser les différences afin d’exclure d’autres usages linguistiques proches – devenus langues différentes. Ce continuum roman occidental peut être subdivisé en quatre groupes : ibéro-roman, gallo-roman, occitano-roman et italo-roman. Le premier regroupe des parlers dont certains serviront à forger le castillan ou le portugais. Le second est à la base du français et du franco-provençal (ou arpitan). Le troisième regroupe un ensemble de parlers[4] qui ont des formes différenciées et standardisées – dont l’occitan ou le catalan – par les choix de graphie, de vocabulaire, d’étymologie ou de grammaire de leurs concepteurs. L’occitan standardisé opte pour une graphie que les défenseurs du gascon, de l’auvergnat[5], du provençal ou du nissard refusent. Le quatrième est un ensemble de parlers entre le sud des Alpes et la pointe de la péninsule italique qui donneront le corse, le frioulan, le ladin, le sarde ou l’italien. Toutes s’écrivent avec un alphabet latin adapté. En terme de continuum, il n’existe pas de frontières nettes entre les différents usages linguistiques romans occidentaux qui se caractérisent plutôt par des formes de parlers de transition. Ainsi, les parlers marchois[6] ou saintongeais[7] sont intermédiaires entre les groupes occitano-roman et gallo-roman. Ce phénomène s’applique aussi lorsque l’on sort du continuum roman occidental. Les régions les plus au nord-est sont en "contact" avec les parlers du continuum germanique, et ceux plus au sud-est avec les parlers slaves méridionaux. Les usages linguistiques au nord-est du gallo-roman sont intermédiaires avec des parlers germaniques, le lorrain[8] par exemple.

Bien que les liens entre le français et F. Merdjanov ne soient pas précisément établis, il n’est pas improbable d’affirmer que ce dernier doit avoir des usages linguistiques gallo-romans. Les Analectes de rien sont rédigées en français standardisé.


Le français

Continuum gallo-roman
Avec la création de langues standardisées, le continuum roman s’est effrité au long du XXème siècle. Le français s’est construit entre le XVIème et le début du XXème siècle en privilégiant des formes linguistiques employées dans la région parisienne[9]. En adoptant une graphie propre, l’enjeu est de se différencier au sein du groupe gallo-roman. Là où le normand[10] opte pour un emprunt germanique, le français lui préfère une racine grecque.

La naissance de ce français standard a largement contribué aux querelles politico-linguistiques entre les spécialistes des différentes langues concernées. En opposition avec la dialectologie alémanique qui y voit des variantes, la dialectologie du français considère les parlers lorrains et mosellans comme étant une de ses propres variantes du nord. Si la dialectologie du franco-provençal présente les parlers brionnais-charolais[11] comme proches de cette langue, la dialectologie du français n’accepte pas cette "séparation". Pour elle, il existe des parlers gallo-romans qui, tous, se rattachent au français[12].

Les enjeux politiques autour des cartographies linguistiques ou dialectales sont considérables. Elles permettent de tracer des frontières extérieures et intérieures, là où il n’y en a pas. Ces cartes ne font que représenter les différences et les proximités d’après une somme de critères linguistiques définis. Il est aisé de fournir une carte de variations quand à la manière de prononcer tel ou tel mot, d’utiliser telle règle grammaticale, tel type de vocabulaire, etc. Mais cela nécessiterait d’établir une carte pour chaque variation et non de se contenter d’une carte généraliste avec des frontières fixes. La dialectologie devrait pouvoir fournir une carte par critère mais ils sont potentiellement trop nombreux pour être représentés si l’on veut prétendre à l’exhaustivité. Ces illusions d’optique cartographiques sont très bien rendues par les visions divergentes défendues par les linguistes occitans, franco-provençaux, français ou alémaniques. L’extrait suivant de la postface des Analectes de rien, adapté à la France et au français, illustre très bien le propos :

Pour le reste, la Macédoine est un pays comme les autres : ses frontières sont une chimère, son histoire nationale une mythologie, son pouvoir politique un rapport de domination et son organisation sociale une contrainte. Comme toute identité collective, la Macédoine est une illusion. Bien sûr, la Macédoine a connu des épisodes de son histoire qu’elle ne partage pas avec les autres pays, mais cela ne change rien.[13]


franco-macédonien ?

Inscription en franco-macédonien (fin XIXe siècle)
Si plusieurs travaux ont été entrepris pour étudier des usages linguistiques disparus dans l’aire gallo-romane[14], aucun n’a vu le jour sur cette problématique de l’existence, ou non, d’un parler franco-macédonien. Une approche protivophile postule trois hypothèses. La première est historique et se base sur les liens symboliques entre la lutte de la niçoise Catherine Ségurane contre les franco-ottomans qui a peut-être influencé des générations de macédoniens contre la domination ottomane. Il n’est pas impensable que des révoltés macédoniens soient venus à Nice pour s’enrichir de l’expérience de C. Ségurane et de mots français pour en ramener un vocabulaire spécifique né de leurs échanges. Dans ce cas, ce franco-macédonien ne peut être antérieur à 1543. La seconde hypothèse est linguistique. Elle pose que si le galicien (par exemple), le français et le roumain se classent parmi le continuum roman, et que celui-ci est en contact avec le continuum slave méridional – auquel appartient le macédonien – avec lequel il partage des parlers de transition, il est plus probable de suspecté l’existence d’un parler franco-macédonien plutôt que galaïco-macédonien. Si des raisons évidentes d’éloignement géographique s’imposent – le nord-est de la péninsule ibérique est plus éloigné que la France des Balkans – il n’en reste pas moins que le français et le roumain sont linguistiquement liés et que le roumain est interconnecté avec l’ensemble slave méridional. Si rien n’est démontré, l’hypothèse reste ouverte. La troisième option est politique. Elle imagine que cet hypothétique franco-macédonien puisse être né de l’interaction entre des réfugiés macédoniens de Nice à la fin du XIXème siècle et des révolutionnaires restés sur place. Impossible par exemple de déterminer avec précision si l’utilisation du terme "terroriste" dans la terminologie des anarchistes macédoniens est d’origine nissarde via le français. Ou inversement.

Seuls des traces écrites permettraient de prouver l’existence du franco-macédonien. Une étude dialectologique n’est pas en mesure de mettre en évidence un tel parler de transition, surtout si celui-ci ne concerne que quelques personnes, ou s’il ne s’exprime que dans un cadre privé. Sa datation précise est encore plus compliquée. Nul ne peut affirmer que F. Merdjanov puisse en avoir été locuteur malgré les indices évidents d’une telle probabilité : "Naissance à Nice en 1970. Dans une famille d’origine macédonienne"[13]. Nous serions en présence d’un sociolecte ou même d’un idiolecte.

Exception française

Les processus de standardisation linguistique et les artifices pour les justifier sont similaires à ceux de nombreuses autres langues officielles, tel le nissard ou le macédonien. Il n’existe pas d’exception française.


Notes

  1. Eric Hobsbawm, Terence Ranger, L'invention de la tradition, 1983
  2. Jean-Marie Klinkenberg, Des langues romanes, 2e éd., Duculot, 1994
  3. Anne-Marie Thiese, La création des identités nationales. Europe XVIIIe – XXe siècle, Seuil, 2001
  4. Jean Lafitte, Guilhem Pépin, La "langue d’oc" ou les langues d’oc ? Idées reçues, mythes & fantasmes face à l'Histoire, 2009
  5. Pierre Bonnaud, L'écriture auvergnate unifiée : origines, principes, conventions, 1982
  6. Guylaine Brun Trigaud, "Les enquêtes dialectologiques sur les parlers du Croissant : corpus et témoins", La langue française, n°93, 1992
  7. Eric Nowak, Histoire et géographie des parlers poitevins et saintongeais, Édition des régionalismes / Pyrémonde, 2010
  8. Léon Zéliqzon, Dictionnaire des patois romans de la Moselle, Éditions Serpenoise, 1923
  9. Henriette Walter, Le français d’ici, de là, de là-bas, JC Lattes, 1998
  10. René Lepelley, Dictionnaire du français régional de Normandie, éd. Christine Bonneton, 1993
  11. Mario Rossi, Dictionnaire étymologique et ethnologique des parlers brionnais, EPU, 2004
  12. René Cuaz-Châtelair, Le Franco-provençal, mythe ou réalité, La Pensée universelle, 1989
  13. 13,0 et 13,1 F. Merdjanov, Analectes de rien, Gemidžii Éditions, 2017
  14. M. Banitt, "Une langue fantôme : le judéo-français", Revue de Linguistique Romane, n° 27, 1963