Albertine Hottin

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Albertine Hottin. Compagne de Serge Netchaïev entre 1870 et 1872 et dont nous ne savons rien.

Biographie

Rue du Jardinet (Paris - VIème). Entre 1853 et 1870
Netchaïev voyage avec un faux passeport serbe au nom de Stepan Grazdanov[1] obtenu grâce à des révolutionnaires bulgaro-macédoniens[2]. Il se déplace entre Paris et Zurich de 1870 à 1872[3], l'année de son arrestation en Suisse puis de son extradition vers la Russie. Les archives de Zurich détiennent des lettres échangées entre Albertine Hottin et Serge Netchaïev – qu'elle connaît sous le pseudonyme de Stéphane – dans lesquels ce dernier fait part de ses sentiments, bien loin des considérations politiques qu'il développe dans Le Catéchisme du Révolutionnaire[4] en 1869 et des tristes caricatures qu'ont fait de lui des littérateurs[5], "mélange de père-fouettard et de froideur militante"[6]. Cette contradiction dans le texte est a rapprocher de la relation entre le négateur F. Nietzsche et Lou Andreas-Salomé.

Je vous aime encore plus qu'auparavant, et je compte les heures que devront s'écouler avant notre rencontre. Je vous embrasse. Tout à vous. Stéphane[7]

Elle vit dans la capitale française lors de la Commune de Paris, mais nous n’avons aucune information sur sa participation. Habite-t-elle près de la rue du Jardinet (VIème arr.) dans laquelle Netchaïev séjourne plusieurs fois lors de ses passages parisiens ? S’y sont-ils croisés ? Nous ignorons si de ces rencontres il y eut progéniture.[8]

L'invisibilité sociale faite aux femmes dans l'écriture de l'Histoire occulte le plus souvent leur présence, schéma auquel n'échappent pas les mouvements révolutionnaires. Leur engagement est minimisé, empreint de romantisme, dévalorisé et expliqué par l’influence unilatérale d’un homme proche (père, frère, oncle, mari ou compagnon) dans des discours sexistes afin de correspondre à la prétendue "nature féminine" qui serait faîte de fraîcheur et de naïveté, de discrétion et de dévouement. Comme Albertine Hottin, disparue derrière la figure de Serge Netchaïev malgré son rôle dans la vie intellectuelle et amoureuse de ce dernier. D'elle, nous ne savons - pour l'instant[9] - rien.

Nous savons peu de choses sur elle ; elle était alphabétisée mais pas très intelligente, politiquement naïve, et dévouée [à Netchaïev][10]

Tout en nous gratifiant de quelques poncifs sexistes, ces mots de Woodford Mc Clellan confirment qu'il n'en sait pas plus. D'après les historiens netchaïevistes, Albertine Hottin est la seule compagne que Netchaiev connaîtra dans sa vie amoureuse. En 1869, Vera Ivanovna Zassoulitch[11] l'éconduit et rien n'est su d'une hypothétique relation entre lui et Varvara Vladimirovna Aleksandrovskia, avec qui il arrive en Suisse à la fin de la même année. Nathalie Herzen repousse aussi les avances d'un Netchaïev qu'elle déteste. La première se réfugie de nouveau en Suisse après la tentative d'assassinat au pistolet contre le général Trepov – seulement blessé – en 1878 et son acquittement surprise. Elle est membre de Terre et Liberté, puis lors des scissions internes de ce groupe se tournera vers le marxisme – elle traduit Karl Marx en 1881 et correspond avec lui – avant d'être l'une des fondatrices d'un groupe marxiste en Russie Émancipation du travail, en 1883. La seconde, Varvara Vladimirovna Aleksandrovskia[12], est une ex-étudiante en médecine, donc cantonnée à la profession de sage-femme par la loi russe, qui manifeste déjà en 1862 dans les contestations étudiantes. Elle accompagne Netchaïev auprès des révolutionnaires bulgaro-macédoniens, puis part avec lui vers la Suisse. Elle est chargée d'y collecter du matériel de propagande à ramener en Russie. Elle est arrêtée par la police russe. Dans une lettre du 30 mars 1870 au ministre de la Justice, envoyée de prison, elle dénonce Netchaïev et propose sa collaboration pour lui tendre un guet-apens. Proposition fictive ou réelle ? Elle est condamnée en août à la privation de tout ses droits et à l'exil définitif en Sibérie pour ses contatcs avec Netchaïev. La troisième, Nathalie Herzen[13] est la fille aînée (née en 1845) d'Alexandre Herzen le théoricien du populisme révolutionnaire en Russie. Elle assiste aux disputes politiques et divergences tactiques entre Bakounine et Netchaïev en Suisse.

Dans la postface de Analectes de rien de F. Merdjanov, publié en 2017, Gemidži Éditions précise qu’ils auraient pu prendre le nom de Éditions Albertine Hottin, "comme une dédicace […] un clin d’œil, une tentative de démythification"[6], s’ils avaient été adeptes d’un tel procédé.


Notes

  1. Mêmes initiales que Netchaïev dont le nom complet est Sergueï Guennadievitch (Netchaïev)
  2. Nicolas Stonoff, Un centenaire bulgare parle, Notre Route, 1963 En ligne
  3. Woodford Mc Clellan, "Nechaevshchina: An Unknown Chapter", Slavie Review,‎ Vol.32, N° 3, 1973 En ligne
  4. Serge Netchaiev, Le Catéchisme du Révolutionnaire, 1869 En ligne
  5. Ivan Tourgueniev, Père et Fils, 1862. Fiodor Dostoïevski, Les Démons, 1871
  6. 6,0 et 6,1 F. Merdjanov, "Vie et œuvre de F. Merdjanov" (Postface), Analectes de rien, Gemidžii Éditions, 2017 En ligne
  7. Enregistrés sous la classification Auslieferung des Sergius Netschajeff
  8. F. Merdjanov (attribué à), L’énigme Floresco, date inconnue, inédit
  9. La protivophilie est à la recherche de toutes les informations permettant d’en savoir plus sur Albertine Hottin.
  10. Woodford Mc Clellan, "Sergei Nechaev in the Period of the Paris Commune", Bulletin. Classe des Sciences Sociales, LIII,‎ 1974 En ligne
  11. Christine Fauré et Hélène Châtelain, Quatre femmes terroristes contre le tsar, Vera Zassoulitch, Olga Loubatovitch, Élisabeth Kovalskaïa, Vera Figner, Maspero, Paris, 1978
  12. D’après Jeanne-Marie Gaffiot, Netchaïeff, L’âge d’Homme, 1989
  13. Michaël Confino, "Un document inédit : le Journal de Natalie Herzen, 1869-1870", Cahiers du monde russe et soviétique, 1969, Vol 10, N° 1 En ligne