Simon Radowitzky : Différence entre versions

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Dans la partie la plus occidentale de l'ancienne principauté de Kiev, demeurée sous autorité polonaise, des paysans russophones parviennent à négocier un statut de libre-organisation contre l'obligation de défendre les armes à la main les frontières. Ils repoussent les avancées des tatars puis des ottomans. Tout au long des XVI<sup>ème</sup> et XVII<sup>ème</sup> siècles, ces cosaques zaporogues<ref>cosaques</ref> se soulèvent contre les polonais et résistent à leur annexion par l'empire tsariste. Installés jusqu'au Dniestr, ils sont de fait dans les marges de l'empire et constituent une sorte d'entité para-étatique servant de garde-frontières qui perdurera jusqu'au XVIII<sup>ème</sup> siècle. Elle est alors intégrée au tsarat de Moscou. D'origine slave, le terme  ''yкраїна''<ref>krajina</ref> (prononcer oukraïna) signifiant "à la marche" est utilisé pour désigner ces régions qui séparent la Russie de ses ennemis occidentaux, le royaume de Pologne et le grand-duché de Lituanie réunis au sein de la République des Deux Nations<ref>alliance lituano-polonaise</ref>.
 
Dans la partie la plus occidentale de l'ancienne principauté de Kiev, demeurée sous autorité polonaise, des paysans russophones parviennent à négocier un statut de libre-organisation contre l'obligation de défendre les armes à la main les frontières. Ils repoussent les avancées des tatars puis des ottomans. Tout au long des XVI<sup>ème</sup> et XVII<sup>ème</sup> siècles, ces cosaques zaporogues<ref>cosaques</ref> se soulèvent contre les polonais et résistent à leur annexion par l'empire tsariste. Installés jusqu'au Dniestr, ils sont de fait dans les marges de l'empire et constituent une sorte d'entité para-étatique servant de garde-frontières qui perdurera jusqu'au XVIII<sup>ème</sup> siècle. Elle est alors intégrée au tsarat de Moscou. D'origine slave, le terme  ''yкраїна''<ref>krajina</ref> (prononcer oukraïna) signifiant "à la marche" est utilisé pour désigner ces régions qui séparent la Russie de ses ennemis occidentaux, le royaume de Pologne et le grand-duché de Lituanie réunis au sein de la République des Deux Nations<ref>alliance lituano-polonaise</ref>.
  
Au cours du XIX<sup>ème</sup> siècle, la plupart des empires ou nations d'Europe sont secouées par l'émergence des nationalismes. A travers tout le continent, des élites intellectuelles, économiques et politiques s'emparent de thèmes tels que la langue, les frontières, la nation, l'ethnie ou la race, l'histoire, le folklore pour construire un argumentaire justifiant des redécoupages de frontières et la création de nouveaux États-nations. Ces nationalismes inventent des identités collectives qui, même si elles sont des illusions, mobilisent des groupes d'hominines prêts à en découdre pour cette nouvelle cause. Chaque nouveau projet d’État-nation puise dans le passé pour se créer une légitimité et une profondeur historique, une artificielle langue nationale est décrétée langue commune, une fallacieuse "communauté de destin" est prétendue et une origine commune est imaginée... Les marches de l'empire russe n'échappent pas à ce phénomène. Une partie de l'intelligentsia citadine se passionne pour le monde paysan<ref>Phénomène appelé ''chlopomania'', composé d'une racine slave ''xлопо'' (chlopo) "signifiant "paysan" et du grec ''mania'' qui indique un engouement</ref> dont elle fait un modèle pour la construction d'un nationalisme ukrainien. Les pratiques linguistiques sont répertoriées puis uniformisées dans une langue ukrainienne commune<ref>Cette intelligentsia n'est généralement pas russophone mais polonisée ou lituanisée</ref> présentée comme différente du russe, le monde paysan est archétypé pour être l'essence de la future nation et la principauté de Kiev devient l'argument d'une légitimité historique pour les prétendants à l'indépendance. Un important travail littéraire, poétique ou ethnographique a largement contribué à l'écriture de cette mythologie nationale.
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Au cours du XIX<sup>ème</sup> siècle, la plupart des empires ou nations d'Europe sont secouées par l'émergence des nationalismes. A travers tout le continent, des élites intellectuelles, économiques et politiques s'emparent de thèmes tels que la langue, les frontières, la nation, l'ethnie ou la race, l'histoire, le folklore pour construire un argumentaire justifiant des redécoupages de frontières et la création de nouveaux États-nations. Ces nationalismes inventent des identités collectives qui, même si elles sont des illusions, mobilisent des groupes d'hominines prêts à en découdre pour cette nouvelle cause. Chaque nouveau projet d’État-nation puise dans le passé pour se créer une légitimité et une profondeur historique, une artificielle langue nationale est décrétée langue commune, une fallacieuse "communauté de destin" est prétendue et une origine commune est imaginée... Les marches de l'empire russe n'échappent pas à ce phénomène. Une partie de l'intelligentsia citadine se passionne pour le monde paysan<ref>Phénomène appelé ''chlopomania'', composé d'une racine slave ''xлопо'' (chlopo) signifiant "paysan" et du grec ''mania'' qui indique un engouement</ref> dont elle fait un modèle pour la construction d'un nationalisme ukrainien. Les pratiques linguistiques sont répertoriées puis uniformisées dans une langue ukrainienne commune<ref>Cette intelligentsia n'est généralement pas russophone mais polonisée ou lituanisée</ref> présentée comme différente du russe, le monde paysan est archétypé pour être l'essence de la future nation, les cosaques sont fantasmés et la principauté de Kiev devient l'argument d'une légitimité historique pour les prétendants à l'indépendance. Un important travail littéraire, poétique ou ethnographique a largement contribué à l'écriture de cette mythologie nationale. Un processus similaire se passe plus au nord pour constituer le nationalisme biélorusse. Les autorités tsaristes répriment durement toutes velléités nationalistes et interdisent les mouvements et les écrits exaltant les aspirations à une nation ukrainienne indépendante.
  
 
== Argentine ==
 
== Argentine ==

Version du 5 janvier 2019 à 23:45

Simon Radowitzky. Anarchiste par choix, moïsien[1] par héritage, russe de nationalité et argentin d'exil.


[en cours de rédaction]


Confins rus'

Expansion de la Moscovie

La région d'Europe orientale, comprise entre la mer Noire et la Baltique, est de part sa géographie un lieu de passage depuis des siècles pour les hordes d'hominines venues de l'Est, du Sud ou du Nord. Des mongols, des tatars, des scandinaves, des caucasiens ou des slaves y sont passés pour répandre le sang ou s'installer durablement. De cette macédoine génétique émergent progressivement à partir du VIIème siècle après JC[2] des États féodaux. Que ce soit le royaume des tribus scandinaves varègues[3], qui adoptent les croyances des christiens, ou l'empire des semi-nomades kazhars[4], qui eux préfèrent celles des moïsiens, ces entités étatiques se structurent pour former de vastes empires régionaux. Ils s'étendent par la guerre ou en faisant des alliances avec les tribus d'hominines qui peuplent la région. Si les kazhars ont laissé peu de traces, des États rus'[5] voient le jour à partir du IXème siècle. La principauté de Kiev éclate au XIVème siècle lors des invasions mongoles. La principauté de Moscou est la grande bénéficiaire de cet éclatement car elle restructure autour d'elle les quelques royaumes rus' qu'elle incorpore petit à petit en son sein. A sa frontière orientale les khanats mongols et à l'ouest les royaumes de Lituanie et de Pologne. La principauté est soumise à l'autorité des mongols desquels elle s'affranchit progressivement tout au long du XVème siècle et grignote des territoires à l'alliance lituano-polonaise. Son pouvoir grandissant, la principauté devient un vaste empire et son dirigeant se proclame "Grand-Prince de toutes les Russies" et son successeur "Tsar de toutes les Russies" en 1547. Monarchie absolue, le tsarat agglomère une multitude d'anciennes principautés dans un empire de plus en plus centralisé.

Dans la partie la plus occidentale de l'ancienne principauté de Kiev, demeurée sous autorité polonaise, des paysans russophones parviennent à négocier un statut de libre-organisation contre l'obligation de défendre les armes à la main les frontières. Ils repoussent les avancées des tatars puis des ottomans. Tout au long des XVIème et XVIIème siècles, ces cosaques zaporogues[6] se soulèvent contre les polonais et résistent à leur annexion par l'empire tsariste. Installés jusqu'au Dniestr, ils sont de fait dans les marges de l'empire et constituent une sorte d'entité para-étatique servant de garde-frontières qui perdurera jusqu'au XVIIIème siècle. Elle est alors intégrée au tsarat de Moscou. D'origine slave, le terme yкраїна[7] (prononcer oukraïna) signifiant "à la marche" est utilisé pour désigner ces régions qui séparent la Russie de ses ennemis occidentaux, le royaume de Pologne et le grand-duché de Lituanie réunis au sein de la République des Deux Nations[8].

Au cours du XIXème siècle, la plupart des empires ou nations d'Europe sont secouées par l'émergence des nationalismes. A travers tout le continent, des élites intellectuelles, économiques et politiques s'emparent de thèmes tels que la langue, les frontières, la nation, l'ethnie ou la race, l'histoire, le folklore pour construire un argumentaire justifiant des redécoupages de frontières et la création de nouveaux États-nations. Ces nationalismes inventent des identités collectives qui, même si elles sont des illusions, mobilisent des groupes d'hominines prêts à en découdre pour cette nouvelle cause. Chaque nouveau projet d’État-nation puise dans le passé pour se créer une légitimité et une profondeur historique, une artificielle langue nationale est décrétée langue commune, une fallacieuse "communauté de destin" est prétendue et une origine commune est imaginée... Les marches de l'empire russe n'échappent pas à ce phénomène. Une partie de l'intelligentsia citadine se passionne pour le monde paysan[9] dont elle fait un modèle pour la construction d'un nationalisme ukrainien. Les pratiques linguistiques sont répertoriées puis uniformisées dans une langue ukrainienne commune[10] présentée comme différente du russe, le monde paysan est archétypé pour être l'essence de la future nation, les cosaques sont fantasmés et la principauté de Kiev devient l'argument d'une légitimité historique pour les prétendants à l'indépendance. Un important travail littéraire, poétique ou ethnographique a largement contribué à l'écriture de cette mythologie nationale. Un processus similaire se passe plus au nord pour constituer le nationalisme biélorusse. Les autorités tsaristes répriment durement toutes velléités nationalistes et interdisent les mouvements et les écrits exaltant les aspirations à une nation ukrainienne indépendante.

Argentine

Notes

  1. Moïsien désigne les adeptes de Moïse, les juifs, comme mahométien celleux qui croient que Mahomet est un prophète - les musulmans - ou christien pour les chrétiens adeptes de Jésus aka Christ.
  2. JC
  3. varègues
  4. kazhars
  5. rus'
  6. cosaques
  7. krajina
  8. alliance lituano-polonaise
  9. Phénomène appelé chlopomania, composé d'une racine slave xлопо (chlopo) signifiant "paysan" et du grec mania qui indique un engouement
  10. Cette intelligentsia n'est généralement pas russophone mais polonisée ou lituanisée