Alain Chany : Différence entre versions
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+ | <blockquote>''J’habite maintenant un pays où la terre est maigre et le squelette apparent. L’hiver y est long, l’été sec, les saisons intermédiaires se résumant à quelques jours où tout éclate – c’est le printemps – et s’abolit en noir et blanc – c’est le froid. Quelques paysans réfractaires s’y dessèchent et gèlent sur pied ; moi-même j’y fais le sphinx et la momie''<ref name="#pari" />.</blockquote> | ||
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+ | Vers 1989 l'installation est agrandie et en 1993 le troupeau comporte 300 individus. Alain Chany consacre la plupart de son temps et de son énergie aux différents travaux inhérents à une bergerie et à une vie rurale : nourrir les brebis, entretenir les installations, couper du bois, s'occuper des plantations, etc. | ||
<blockquote>''Pour ce qui est de l'écriture, je n'aime pas être organisé. J'aime improviser. Le temps de l'écriture est un temps particulier. [...] J'écris lorsque je pense qu'écrire est plus important que tout'' <ref name="#ina" /></blockquote> | <blockquote>''Pour ce qui est de l'écriture, je n'aime pas être organisé. J'aime improviser. Le temps de l'écriture est un temps particulier. [...] J'écris lorsque je pense qu'écrire est plus important que tout'' <ref name="#ina" /></blockquote> |
Version du 9 octobre 2018 à 16:22
Alain Chany. Éleveur de chèvres altiligérien décédé en 2002.
Fils du rienNé à Langeac, le grand-père paternel d'Alain Chany immigre vers Paris au lendemain de la Première guerre mondiale pour fuir la misère économique. Comme beaucoup de bougnats[1] il y ouvre un café, dans le XIème arrondissement de la ville-capitale française. Son père, Pierre Chany, après des rêves de carrière de cycliste interrompue par la Seconde guerre mondiale, de multiples petits boulots et un passage par la résistance clandestine à l'invasion allemande, devient un journaliste sportif spécialiste du cyclisme. Alain Chany naît à Paris en 1946. Selon ses propres dires[2], il commence à écrire vers l'âge de 15 ans. Il fait des études à la Sorbonne où il obtient une licence de philosophie. Les remous sociaux et politiques qui secouent la France dans la fin des années 1960 sont porteurs de beaucoup d'espoirs pour une jeune génération. Les grèves ouvrières et les contestations estudiantines sont traversées de rigueurs idéologiques, de spontanéités libertaires, de misère économique et de rêves de lendemains différents. Mai 68 sonne le glas de tout cela. La déception est grande pour tout celleux qui ont cru y voir, au mieux, un possibilité révolutionnaire de renverser l'état des choses, au pire, un moyen de mendier quelque-chose à l’État. Ce retour au calme est surtout un retour à la normalité : les ouvriers au travail et les étudiants à se concocter un avenir brillant. La fracture sociale est toujours aussi présente, les ouvriers et les étudiants prolétarisés d'un côté, les "fil(le)s de" et les carriéristes de l'autre. Les uns travailleront pour les autres.
Si les illusions d'hier laissent place à la résignation et à la désillusion pour le plus grand nombre, pour certains elles ouvrent de belles carrières de journalistes, de politiques, de publicistes, d'avocats, d'artistes, d'intellectuels, etc. Tout ce qui était honni devient opportunité, tout ce qui était rejeté est maintenant convoité. Jusqu'à l'écœurement. Celleux qui ont refusé cet ordre de dispersion, qui ne se sont pas suicidés de désespoir ou qui ne sont pas rentrés dans le rang, constatent avec tristesse que le "vieux monde" est toujours là. Amer, Alain Chany publie en 1972 le roman-récit L'ordre de dispersion[4].
Parmi tout celleux qui sont déçus, il y en a qui décident de rompre avec les pratiques politiques habituelles et envisagent de ce mettre en marge. Parfois avec l'utopie de vouloir vivre "autre chose", parfois par simple rejet de l'existant. Les années 1970 sont celles des communautés de "baba-cool", des expériences collectives ou des projets alternatifs. Ces migrations d'urbains vers les campagnes pauvres répondent aussi à la difficulté de vivre dans des grandes agglomérations urbaines pour celleux qui n'ont qu'un petit boulot ou n'en ont pas du tout.
Alain Chany participe à la revue Subjectif du "Groupe pour l’organisation unifiée de la lecture appliquée et généralisée" qui fait paraître sept numéros entre février 1978 et décembre 1979[6]. Influencée par le marxisme et le surréalisme, Subjectif est une revue littéraire, critique de cinéma et poètesse, au ton irrévérencieux. Dans le numéro 5 de février 1979, dont le thème est "Le retour du Je", il y fait paraître le texte "Le cirque d'hiver" [7].
Le succès de L'ordre de dispersion ne nourrit pas son auteur. La fin des années 1970 rime pour Alain Chany avec galère et désillusion. Rechercher un travail salarié ne fait pas partie de ses projets et il survit comme il le peut, sans travail, ni maison. Et pas seulement parce qu'il pleut à Paris, il décide finalement de quitter la ville courant 1978 pour la Haute-Loire où il peut, selon lui, au moins vivre d'un potager et avoir un toit. Il veut y trouver :
AltiligérienDirection Langeac dans la maison du grand-père paternel. Puis Alain Chany, avec femme et enfant, se lance dans un projet d'élevage de brebis. Installée sur les hauteurs des gorges de l'Allier dans le hameau de Ramenac - dépendant de la commune de Monistrol-d'Allier en Haute-Loire [9] - une bergerie voit le jour en 1985 avec un troupeau de 200 bêtes. Ramenac est dans la Margeride, région montagneuse à cheval sur les départements du Cantal, de la Haute-Loire et de la Lozère, où la fameuse bête du Gévaudan sema la terreur dans la seconde moitié du XVIIIème siècle[10]. Le climat est rude.
Vers 1989 l'installation est agrandie et en 1993 le troupeau comporte 300 individus. Alain Chany consacre la plupart de son temps et de son énergie aux différents travaux inhérents à une bergerie et à une vie rurale : nourrir les brebis, entretenir les installations, couper du bois, s'occuper des plantations, etc. La vie quotidienne est celle d'un petit éleveur qui trime dur et qui peine à maintenir son exploitation à flot. Il note ses réflexions sur des bouts de papiers et des cahiers d'écoliers. Parfois, il vient se distraire en contre-bas de Ramenac au bar de Pont d'Alleyras, sur les bords de l'Allier, y acheter du tabac et se ressourcer auprès de son philosophe préféré, Heineken, qui l'empêche de voir double. Le Pont d'Alleyras est l'un des hameaux de la commune d'Alleyras, une de ces innombrables petites gares où ne s'arrête pas toujours le train de la ligne Paris - Marseille, via le Massif central, aussi appelée Le Cévenol.
Il écrit jusqu'au début des années 1980, mais cela reste dans ses tiroirs. Pendant une dizaine d'années, il cesse d'écrire. Finalement, il envoie un manuscrit et, en 1992, publie Une sécheresse à Paris. Vingt ans après la sortie de L'ordre de dispersion, ce second et dernier livre d'Alain Chany reçoit un accueil favorable de la part des critiques littéraires[12] et Alain Chany fait un passage dans l'émission Bouillon de culture animée par le sectateur de la francophonie Bernard Pivot.
Le 2 décembre 2002, Alain Chany décède subitement, terrassé par une commotion cérébrale. NécrologieBien plus qu'un conseil vestimentaire, une ode tabagique ou une astuce bricolage, la courte nécrologie d'Alain Chany proposée par F. Merdjanov dans Analectes de rien a des airs d'éloge funèbre.
Dans cette macédoine de près de 200 auteurs cités qu'est l'ouvrage de F. Merdjanov, publié en 2017, Alain Chany tient une place particulière. Auteur le moins prolixe de cet univers protivophile, parmi les moins connus, plutôt taiseux que volubile, il parvient à résumer en quelques mots ses pensées les plus profondes, là où les autres ont tenter de s'expliquer difficilement à travers des milliers de pages. Nul besoin de longues dissertations philosophiques, de néologismes incompréhensibles, de dictionnaires à portée de main ou d'être contraints d'ingurgiter les "classiques". Sans fioriture, il synthétise son rapport au monde. Avec une "simplicité de moyens" qu'il assume[2], il recrache tel quel les nausées que lui causent le monde dans lequel il vit. Le sac à vomi est compact et tient dans une main, ce qui libère l'autre pour mieux distribuer les soufflets mérités. Sans haine, ses écrits mettent le feu à l'existant. Alain Chany, en réhabilitant le silex face au briquet, la simplicité face à la modernité, reste un incendiaire. Volontaire. Conseiller culinaire qui s'ignore, il nous rappelle sobrement qu'un plat qui peut se révéler meilleur froid s'accompagne toujours très bien d'un peu de moutarde. L'essentiel tient en quelques mots.
Traités culinaires
Recueil des trois publications :
Notes
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